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Encres alliées : une création à plusieurs mains (épisode 4)

Encres alliées, c’est un projet de création pluridisciplinaire. Neuf volets, neufs univers, entre textes, musiques, illustrations et lecture. À découvrir régulièrement sur Youtube, où que vous soyez.

En cette période d’incertitude sanitaire, la création n’a pas dit son dernier mot. Paul Castellano, étudiant à l’Institut littéraire suisse de Bienne, a réuni des auteur.e.s, des illustrateur.trice.s, des musicien.ne.s et des lecteur.trice.s. Son projet ? Créer ensemble, en mêlant texte, musique, lecture et dessin. Les Encres alliées vous proposent ainsi de découvrir, au fil des semaines, neuf univers différents.

Le quatrième épisode a pour titre « Kalinka ». Il réunit Camille Leyvraz (texte), Louison Alix et Adrien Zumthor (lecture), Paul Castellano alias Lupa (musique) et Loretta Cornaz (illustration). Comment ces artistes ont-ils créé ensemble ?

La Pépinière : Bonjour à tous les cinq ! Lorsque je lis le titre « Kalinka », je pense immédiatement à ce chant russe traditionnel si célèbre… Camille Leyvraz, que pouvez-vous nous en dire ?

Camille Leyvraz : Kalinka est un assemblage de trois textes courts, qui parlent de douleur, de vengeance et de liberté. Ils me tiennent à coeur, car ils évoquent le viol et certaines étapes de reconstruction. Je les ai écrits avec une attention spécifique à la sonorité et au rythme, ce qui, je trouve, fonctionne très bien avec l’entrelacement des voix des comédiens.

La Pépinière : Pour ce texte, le choix s’est porté sur lecture à deux voix, avec Louison Alix et Adrien Zumthor. Pourquoi ce choix ? Qu’est-ce que cela apporte au texte ?

Louison Alix : Concernant le processus de travail pour ces lectures, nous travaillons tous, compositeur, artiste plasticien et acteurs lecteurs, chacun de notre côté, et Paul s’occupe de recouper les créations et d’en faire un tout. Je trouve que c’est enrichissant d’avoir plusieurs points de vue sur un même texte et de les mettre ensemble à la fin pour créer un objet à plusieurs sens, à plusieurs couleurs.

Pour la préparation des lectures, mon travail d’actrice et ma formation en école supérieure m’ont donné des clefs stables pour savoir aborder un texte, le questionner, chercher ce qu’il raconte, les plusieurs possibilités de rythmes, tout en essayant au maximum de comprendre la volonté de l’auteur.

Adrien Zumthor : On avait envie de travailler ensemble, à deux voix. Pour cette lecture, nous avons eu accès au son et à l’illustration après coup. On a donc fait un enregistrement « à blanc ». On a hésité sur la forme à donner : est-ce qu’on allait lire chacun son tour une phrase ? chacun son tour un texte – puisqu’il est en triptyque ? Finalement, on a vu que cela marchait bien d’alterner les moments de lecture ensemble et d’autres séparée, pour en faire un vrai binôme. On a fait beaucoup d’essais et ce format s’est finalement imposé à nous, après plusieurs tentatives peu concluantes. Cela nous paraissait également intéressant d’avoir une voix féminine sur Kalinka et une voix masculine sur d’autres aspects, d’où la découpe telle qu’elle a été faite.

La Pépinière : La forme du texte a donc joué un rôle prépondérant dans la répartition de la parole, mais qu’en est-il de la musique, comment la composition a-t-elle été envisagée ?

Paul Castellano (alias Lupa) : Kalinka étant un triptyque, j’ai essayé de bien distinguer les trois ambiances qui se dégageaient des trois parties du texte. Il y avait quelque chose de l’ordre du conte mystérieux et poétique, avec une certaine froideur dans les mots, c’est ce qui m’a inspiré les percussions très réverbérées et la basse sub très ronde. Pour la deuxième partie du triptyque j’ai inséré ce thème avec des bells et une batterie un peu trap, ce qui faisait avancer le récit et maintenait cette ambiance crue et viscérale. La troisième partie quant à elle est plus douce, le texte amenait une forme de résolution avec ce lac gelé que j’ai tenté de garder.

La Pépinière : Le tout n’en serait pas un sans l’illustration. On semble distinguer la forme d’un corps morcelé, fait d’encre. Comment est venue cette idée ?

Loretta Cornaz : Avant tout j’aimerai vous dire que je suis très heureuse d’avoir l’occasion d’échanger avec vous à propos de ce projet auquel j’ai eu la chance de participer.

Lorsque l’on m’a proposé de participer à ce projet, l’enregistrement du texte avait déjà été fait, j’ai donc pu l’écouter à plusieurs reprises, afin de me familiariser avec ce dernier. Comme le texte se compose de trois parties,  et est très imagé, j’ai voulu me concentrer sur les scènes qui me touchaient le plus et que je visualisais le plus clairement. J’ai choisi de réaliser une illustration plutôt épurée afin de permettre à la poésie du texte de coexister avec cette peinture.

Dans ma pratique artistique, je m’intéresse beaucoup au corps, et principalement à la représentation du corps féminin. En écoutant le texte, cela a fait écho à mon travail, j’ai ainsi choisi de représenter le corps tel que je le percevais au travers des mots.

La Pépinière : Merci à vous pour ces réponses ! Et bon vent au projet Encres alliées !

Propos recueillis par Fabien Imhof

Photo : ©Loretta Cornaz

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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