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L’écriture qui pousse #2 : Mais qui est donc Ornicar ?

Bienvenue dans L’écriture qui pousse ! Aujourd’hui, vous allez découvrir un des textes produits dans le cadre de nos défis littéraires. Le défi du mois d’octobre 2020 portait le titre suivant : « Le règne animal ». L’idée ? Écrire un texte entièrement du point de vue d’un animal.

Aujourd’hui, Fabien Imhof se glisse dans la peau d’un certain Ornicar, à l’apparence… plutôt étrange. Mais qui est-il ?

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Mais qui est donc Ornicar ?

Je me présente, mon nom, c’est Ornicar. Et je dois vous dire, je suis vraiment, mais alors vraiment pas content !

Non mais sérieusement, c’est quoi cette dégaine ? Ma bouche est toute plate, ma queue aussi… et les volumes dans tout ça ? Oh, je suis pas une raie manta, non mais ! On sait pas si je suis conçu pour aller dans l’eau ou vivre sur terre. Non, moi je vous le dis, c’est n’importe quoi ! Regardez-moi : je ressemble à un canard poilu. Et puis cette queue… on en parle de ma queue ? On dirait que je l’ai piquée à un castor. C’est pas une vie ça ! On aurait pu au moins me filer des pattes qui me permettraient d’attraper des trucs. Mais non ! J’ai les pattes palmées. Je suis quoi, au juste ? J’ai plusieurs théories, mais si je retrouve le fautif, je vous jure, il va passer un sale quart d’heure !

Bon, la théorie la plus simple, c’est que ma mère et mon père sont issus d’espèces différentes. Ouais, mais le problème, c’est que je les connais pas, moi, ils m’ont abandonné à la naissance. Avec une gueule pareille, aussi, je les comprends ! Enfin, ça leur apprendra à coucher avec n’importe qui ! Un canard avec une castor… ou un castor et une cane. À tous les coups, ils étaient bourrés et c’était au milieu d’une partouze, ils ont pas assumé ! Parce que bon, même si ma mère savait pas qui était le père au départ, qu’elle soit cane ou castor… en voyant ma tronche, elle a bien dû s’en douter ! Non, mais c’est possible hein, après tout !

Bon après… j’ai discuté avec une copine colombe. Faut savoir qu’on comprend pas bien ce qu’elle dit, avec son rameau d’olivier toujours à la bouche. Enfin bref, d’après elle, il y a un vieux barbu tout blanc qui décide de tout, qui aurait tout créé. Je veux bien, mais bon, j’y crois pas trop. Vous savez combien d’espèces on est, sur Terre ? Deux millions d’après les scientifiques, mais ces branleurs pensent qu’on est peut-être cinquante fois plus. Ils attendent quoi pour nous trouver tous ? Faudrait s’y mettre, les gars ! Bref, je vous parlais du vieux barbu. Vous allez quand même pas me faire croire que machin-là, il a pu tout faire tout seul ? Il a dû déléguer, c’est possible, ou alors il avait vraiment rien à foutre de ses journées… mais s’il avait pu filer ça à un mec qui savait dessiner ou qui avait un peu de logique, ça m’aurait arrangé. Au moins, j’aurais ressemblé à quelque chose. Non mais sérieux, j’ai l’air de quoi là ?

Après il y a la théorie de mon pote le rat. Bon, lui il était blanc à la base, pis maintenant il est tout gris avec des étoiles sur le dos. Il a vécu des trucs qu’il peut pas raconter. Secret-défense il paraît. Enfin, je prends ça avec des pincettes, parce qu’un mec qui raconte qu’il était une belle souris pis qui ressemble à ça, il y aurait deux-trois piqûres entre deux que ça m’étonnerait pas. D’après lui, il y a des humains – quels tarés ceux-là, je vous jure ! – qui s’amuseraient à mélanger des ADN dans des éprouvettes pour créer de nouvelles espèces. Il pense que je viendrais de là : une expérience qui aurait mal tourné. Et on m’aurait laissé m’échapper, comme ça ? On aurait tout faire pour pas que ça se sache… surtout qu’avec mon physique de crêpe ratée, on m’aurait rattrapé vite fait, bien fait !

Bref, il y a plein de théories, mais je sais toujours pas d’où je viens, ni qui je suis. Pis si j’écoutais ces connes de chouettes, toujours à philosopher, je serais pas sorti de l’auberge. D’après elles, tout est là pour quelque chose, il faut juste essayer de se comprendre soi-même. C’est de la métaphysique, il paraît… bah en attendant, moi j’ai toujours un physique bêta, mais ça m’avance plus loin, hein !

J’espère que je vous ai pas trop ennuyé avec mes histoires. Fallait que ça sorte, j’en ai marre de ressembler à rien et de pas savoir qui je suis. Je vous laisse, il y a ma femme qui va accoucher, faut que je sois près d’elle. Je sais même pas si on va avoir un petit truc chelou comme moi ou des œufs…

Fabien Imhof

Photo : © Daniel Goeleven

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Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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