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Les Guides à pattes : nom d’un Burgonde !

Moi, Maximus illustre chef du plus beau poulailler de Genava, j’ai été désigné pour te guider à travers ma magnifique ville au temps du Royaume burgonde. Tu es paré pour l’aventure, mon ami ?[1]

En 443 après J.-C., il s’en passe des choses, au bord du lac qu’on appelle aujourd’hui le Léman ! Les Burgondes, alliés de l’Empire romain, s’installent à Genava (l’actuelle Genève). Que font-ils là ? Cette question, vous allez l’aborder dans Les Burgondes à Genava, un guide pas comme les autres, écrit par Lucile Tissot et illustré par Bernard Reymond, publié aux éditions Infolio.

Dans votre périple, vous serez guidé par Maximus, un coq prétentieux jusqu’au bout des plumes. Lui, il n’aime pas les Burgondes. Heureusement, la poule Clotilde[2] est là pour remettre le vaniteux en place. Et voici nos deux gallinacés lancés dans les rues pavées… Car Clotilde et Maximus ne sont pas des oiseaux de basse-cour comme les autres : ce sont des Guides à pattes. Leur mission ? Faire découvrir le patrimoine archéologique suisse aux jeunes lecteurs (dès 8 ans), en leur faisant vivre toutes sortes de péripéties !

Sur la trace des Burgondes…

Nous voici donc à Genava. Tout commence par une présentation en règle des Burgondes : qui sont-ils ? Pourquoi se sont-ils alliés aux Romains ? Quelles sont leurs relations avec les peuples dit « barbares » (autrement dit, ceux qui ne vivaient pas au sein de l’Empire) ? Carte à l’appui, Clotilde revient sur les tensions qui existaient à l’époque : pour défaire les Alamans venus du Nord, les Romains n’ont d’autre choix que de s’allier aux Burgondes. De fil en aiguille, les Burgondes arrivent à Sapaudia, la région où se trouve Genava. Après avoir examiné les cartes, Clotilde vous donne un petit cours de numismatique, la science des pièces de monnaie. Vous savez comment reconnaître un sou burgonde, vous ?

Tandis que la poule met l’accent sur les différences entre les peuples – les Burgondes se sont vite intégrés aux populations vivant à Genava –, Maximus campe sur ses ergots… et ses positions. « Qu’ils étaient bruyants, mal élevés et peu instruits. Je ne te parle même pas de leur système judiciaire… » (p. 8) Peut-être, peut-être. N’empêche, souligne Clotilde, « même s’ils étaient très différents, ils faisaient des efforts considérables pour se faire accepter. » (p. 8) Apprentissage du latin, nivellement des lois, conversion religieuse… Mine de rien, la poule malicieuse met l’accent sur l’intégration et la tolérance.

Genava… autrement !

Si Maximus et Clotilde parlent beaucoup des Burgondes, la véritable star de leur promenade, c’est Genava ! Grâce aux dessins de Bernard Reymond, c’est comme si on y était : vues d’ensemble, zooms sur les ruelles, jeu de cherche-et-trouve dans le marché… sans oublier le quartier religieux de la cité ! Les Burgondes à Genava visent en effet à promouvoir le site archéologie de la Cathédrale Saint-Pierre, qu’on peut visiter au cœur de la vieille ville de Genève. Une série d’activités ludiques permet d’explorer ces thématiques en s’amusant. La présence d’un glossaire en fin de guide est également très utile pour faire le point sur les notions un peu complexes (même pour les grands !). Ni trop simpliste, ni trop complexe, la vulgarisation proposée donne une idée assez précise d’une période, d’une problématique, d’un lieu : en une demi-heure avec Clotilde et Maximus, j’en ai appris suffisamment sur les Burgondes pour comprendre en quoi ils ont tant enrichi Genava.

Bien vite malheureusement, le périple prend fin. Il reste encore tant à dire ! Avant de quitter leurs lecteurs, Clotilde et Maximus sèment les graines de la curiosité : que va devenir le royaume burgonde ? Quels sont ses relations avec les Francs ? Voilà de quoi pousser à la découverte et, peut-être, susciter des vocations.

Suivez les Guides à pattes !

Vous l’aurez compris : Les Burgondes à Genava est un guide éducatif qui s’adresse aux jeunes lecteurs, grâce à l’image et l’humour. Avec ses personnages attachants, il plonge les petits et les grands dans la Genève de jadis. Mais ce n’est pas tout ! Onzième volume de la collection Les Guides à pattes, l’ouvrage s’appuie sur une vraie réflexion, à la fois pédagogique et scientifique. Chaque volume est ainsi pris en charge par un Guide à pattes différent, qui fait découvrir un site ou une thématique particulière : La Vie des Lacustres a par exemple été réalisée en collaboration avec le Laténium de Neuchâtel[3] et suit une famille de chiens bien turbulents.

Collection bilingue (ouvrages disponibles en français ou en allemand), Les Guides à pattes abordent trois périodes différentes (Préhistoire, Époque romaine, Moyen Âge) et sillonnent le pays : Fribourg, Lausanne, Yverdon, Lausanne, Zoug, Bienne, Argovie, Nyon, Avenches, Bâle… À Genève, le projet met en valeur la Cathédrale Saint-Pierre et ses trésors archéologiques. C’est à l’initiative de l’association AvAnt Ge que Les Burgondes à Genava doit le jour. Association de valorisation de l’Antiquité à Genève, AvAnt Ge est bien connue des amoureux d’antiquité et des amis de l’Université de Genève : la Nuit Antique et sa farandole d’activités, c’est eux[4] !

Les Guides à pattes réunissent différents acteurs issus du domaine scientifique et formés dans les sciences de l’Antiquité. Professionnels des musées, médiateurs culturels, enseignants, archéologues et historiens, spécialistes en littérature jeunesse, associations de protection du patrimoine… tous s’associent pour proposer des contenus ludiques et rigoureux. Proposés dans les bibliothèques scolaires des cantons concernés, ces petits bijoux sont également accessibles sur les sites dont ils font la promotion : par leur approche différente, ils sont un contre-point idéal à une visite dans un musée.

Seul bémol pour Les Guides à pattes ? C’est trop court ! Moi, j’aurais bien aimé en savoir encore plus sur Genava, sur ses cathédrales et sur le travail des archéologues qui mettent au jour les vestiges de notre passé…

Un dernier mot ? Noël approche : pensez aux petits lecteurs avides de découverte !

Magali Bossi

Référence :

Lucile Tissot, Bernard Reymond, Les Burgondes à Genava, Gollio, Infolio, coll. Les Guides à pattes. Moyen âge volume 1, 2018.

www.lesguidesapattes.ch

www.infolio.ch

www.nuitantique.ch

Illustrations : ©Bernard Reymond

[1] Lucile Tissot (texte), Bernard Reymond (illustration), Les Burgondes à Genava. Les Guides à pattes : Moyen Âge vol. 1, Lausanne, Infolio, 2018. L’ensemble des références est tiré de cette édition.

[2] Un nom bien burgonde, puisque la princesse Clotilde (la vraie, pas la poule !) a épousé le roi des Francs Clovis, en 493.

[3] Voir http://latenium.ch/

[4] Pour les curieux : www.nuitantique.ch

Magali Bossi

Magali Bossi est née à la fin du millénaire passé - ce qui fait déjà un bout de temps. Elle aime le thé aux épices et les orages, déteste les endives et a une passion pour les petits bols japonais. Elle partage son temps entre une thèse de doctorat, un accordéon, un livre et beaucoup, beaucoup d’écriture.

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