Le banc : cinéma

Visions du Réel – Atelier critique – Jesa (4)

Aujourd’hui, La Pépinière vous emmène au sein de l’atelier de critiques qu’elle organise pendant le festival Visions du Réel. Les participant-e-s ont visionné un court-métrage intitulé Jesa et se sont livrés à un exercice de critique courte. En voici deux, signées Thalia Eissler et Yasmine Bahechar.

Jesa, quand les ancêtres se mettent à table

Le court-métrage de la réalisatrice Kyungwon Song interroge avec humour et finesse une tradition coréenne bien ancrée, le jesa. Cette cérémonie traditionnelle, pratiquée le jour de l’anniversaire de la mort d’un ancêtre, consiste à dresser une table avec des offrandes.

Guidée par les voix off de ses parents qui répondent à ses questions et guident ses gestes à distance, via Skype, selon des règles bien précises, la réalisatrice coréenne filme la mise en place de l’autel où se déroulera le rite familial tout en discutant de celui-ci. D’abord présente face caméra, elle s’efface petit à petit pour laisser place, faisant recours à la technique du stop motion, à une valse d’ustensiles de cuisine, éléments de vaisselle et aliments de toutes sortes qui se meuvent, s’apprêtent et se dégustent seuls sur fond sonore de planche à découper, grill et poêle à frire.

À travers sa performance, Kyungwon Song semble vouloir inviter le spectateur à questionner avec elle les origines de la cérémonie, son caractère sexiste et son sens actuel. À la rigidité du rite, illustrée avec humour par les gestes hésitants de la réalisatrice qui se sert par exemple de la boussole de son smartphone pour orienter le plat de poisson selon les indications rigoureuses de son père, se superpose le discours plus léger et progressiste de la mère. Un moment de partage intime et familial qui nous offre une fenêtre sur la société coréenne d’aujourd’hui.

                                                                Thalia Eissler

Référence :

Kyungwon Song, États-Unis, Corée du Sud, 2019, 6 minutes

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Jesa : une tradition revisitée

En Corée du Sud, Kyungwon Song, une jeune réalisatrice nous initie à la préparation de l’une de leurs traditions. Le jesa est un rituel dédié aux ancêtres et les honore par un magnifique repas qui donne l’eau la bouche.

Le film débute par un plan fixe sur la préparation de la table qui sera décorée petit à petit. À l’occasion de ce rituel, filmé comme une performance, des voix fantômes qui se contredisent parfois donnent la marche à suivre. À travers l’initiation de cette pratique ancestrale dictée, le spectateur devine un double point de vue : la femme à la cuisine ; l’homme qui orchestre le tout. Au centre, la réalisatrice essaie de trouver sa place.

Ce film enchanteur et légèrement burlesque propose une lecture et un rapport à cette tradition de manière à remettre les pendules à l’heure. La thématique abordée remet non seulement en question cette tradition d’origine japonaise héritée par les hommes mais peut au passage changer ton point de vue sur d’autres traditions et de cultures différentes. Kyungwon Song ne pointe pas du doigt son père ou ses ancêtres mais voyage introspectivement à travers cet univers et pousse à s’interroger. Au fond, pour qui et pourquoi les traditions sont-elles perpétuées ?

Yasmine Bahechar

Référence :

Kyungwon Song, États-Unis, Corée du Sud, 2019, 6 minutes

Photo : Kyungwon Song, États-Unis, Corée du Sud, 2019, 6 minutes

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