Les réverbères : arts vivants

Aller au-delà des frustrations

Après une résidence d’écriture au Théâtre Benno-Besson d’Yverdon, Latifa Djerbi et toute une équipe occupent actuellement le Théâtre Pitoeff, avec la dernière création de la compagnie « Les Faiseurs de Rêves » Frustrée !, une comédie décalée.

La Pépinière (L.P.) : Latifa, bonjour et merci de nous recevoir dans les locaux du Pitoeff. Pouvez-nous dire quelques mots sur la naissance de ce projet, Frustrée ! ?

Latifa Djerbi (L.D.) : Suite à une performance autour du thème de la frustration, j’avais envie de poursuivre et approfondir le sujet. Georges Grbic, directeur du Théâtre Benno-Besson, m’a alors proposé une résidence d’écriture, j’ai saisi cette chance. Comme il est question, entre autres, d’oser un jeu audacieux et subtil j’ai choisi une équipe qui « ose » : quelle belle rencontre scénique avec Emilie Blaser. Je l’avais croisée au Théâtre de Carouge par un heureux hasard lors de notre dernière création pour l’ouverture du Théâtre Ephémère La Cuisine, et le courant était passé.

J’ai ensuite été informée du projet de Sami Kanaan de soutenir les compagnies genevoises en leur proposant une résidence de 6 semaines au Théâtre Pitoëff. J’ai eu la chance de faire partie des quatre projets choisis. Et nous voilà donc comme deuxième compagnie en résidence au théâtre pour cette saison !

L.P. : À propos de ce spectacle, de quoi parle-t-il ?

L.D. : Il s’agit d’une opération de défrustration menée par une coach chic et choc. Ce spectacle parle avec beaucoup d’auto-dérision des faux besoins et des vraies frustré-e-s. C’est un spectacle plein d’humour, qui permet de prendre un peu de hauteur et d’apporter un peu d’air et d’esprit à des sujets plus lourd. Les gens nous disent vivre une expérience singulière et très sensible. On assiste à l’affranchissement jouissif d’une femme, l’humour quelque peu subversif et décalé n’y est jamais gratuit.

L.P. : Pourquoi ce spectacle-là, maintenant ?

L.D. : Je pense que c’est la période idéale, juste avant les fêtes. La plupart des gens venus nombreux à ces quatre premières séances ressortent heureux ! L’humour est essentiel, surtout avec des sujets aussi profonds. L’humour permet d’aller plus loin et on oscille ici entre des moments de grande intériorité et intensité émotionnelle et d’autres moments très drôles. Il y a une belle complicité, une belle alchimie entre Jacques Livchine et nous trois : Lamia, Emilie et moi-même. Et puis il y a plein de surprises…

L.P. : Vous parlez de faux besoins. C’est un sujet qui semble central dans cette pièce. Est-ce à l’image de ce que vous voyez dans la société ?

L.D. : Dans la vie, on a sans cesse besoin de combler des manques. Pour ce faire, on se crée des faux besoins. Il y a une sorte de formatage social, notamment à travers la publicité. Dans cette pièce, la liberté est centrale, on y questionne la libre pensée, l’identité et la joie. L’idée étant de trouver le chemin de sa propre joie.

L.P. : Revenons sur la genèse de ce spectacle. Tout a commencé avec cette résidence d’écriture au Théâtre Benno-Besson. Que pouvez-vous nous en dire ?

L.D. : Georges Grbic accueille beaucoup de résidences d’écriture. Je ne peux que le remercier pour cela. Il insuffle un terreau propice à l’éclosion d’auteurs locaux, originaires de toute la Suisse romande. J’ai eu la chance de pouvoir écrire cette pièce au TBB à Yverdon et de le monter à Genève à Pitoëff. Nous le jouerons ensuite à Yverdon.

C’est un spectacle rempli de ce que l’on pourrait nommer « une énergie adolescente ». Samedi soir, nous avons joué devant une salle comble avec un public de jeunes gens qui ont été bouleversés et saisis par la pièce. C’est du théâtre vivifiant qui rassemble. Je pense que c’est là une des fonctions principales du théâtre, et c’est ce qu’on cherche à transmettre.

L.P. : Latifa, merci beaucoup ! Pour conclure, pourquoi faut-il absolument venir voir CE spectacle ?

L.D. : C’est une question piège, ça ! Je pense que c’est un spectacle à découvrir. Si je dis pourquoi, je donne la clé du spectacle… Je dirais que si quelque chose vous manque dans la vie, si vous êtes un tant soit peu frustré-e, alors il faut venir !

Propos recueillis par Fabien Imhof

Infos pratiques :

Frustrée !, de Latifa Djerbi, du 5 au 29 décembre 2019 au Théâtre Pitoeff.

Conception et écriture : Latifa Djerbi, accompagnée de Jacques Livchine

Avec Emilie Blaser, Latifa Djerbi et Lamia Dorner

http://www.lesfaiseursdereves.ch/esp_fustre.html

Photo : © Cie Les Faiseurs de Rêve

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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