Les réverbères : arts vivants

Au crépuscule avec Ruth Childs

Dans le cadre du festival de La Bâtie, le 6 septembre, nous avons vécu une expérience suspendue hors-du-temps, au milieu du parc des Evaux, proposée par Ruth Childs et son fantasia coloré. 

Quelle belle idée de faire se déplacer le public jusqu’au parc des Evaux, à Onex, dans un endroit maintenu secret jusqu’au bout. Guidé-es par l’équipe de la Bâtie, nous arrivons dans un cadre magnifique, surplombant un étang, avec en arrière-scène des chênes, des bouleaux, et un soleil couchant qui sublime le tout. fantasia est le premier solo de Ruth Childs, créé en 2019 à l’ADC, et depuis sa création elle aime le faire voyager, car elle a joué notamment au musée de l’Orangerie à Paris, au milieu des œuvres de Monet. 

Dans ce décor délimité uniquement par des haut-parleurs au sol, Ruth Childs arrive, parée de mauve, et commence face contre terre, avec des mouvements qui évoquent un oiseau blessé, peinant à s’envoler. La pièce débute avec la Symphonie n°6 de Beethoven, le corps de la chorégraphe répond et dialogue avec les notes, tout en légèreté. La musique classique est au cœur de fantasia, notamment avec l’inspiration du film éponyme de Disney sorti en 1940, mais c’est surtout l’occasion pour Ruth Childs de convoquer les souvenirs musicaux de son enfance. Grâce à ce répertoire musical, plutôt réservé aux ballets qu’à la danse contemporaine, elle peut aller explorer de nouveaux mouvements, de nouveaux éléments. 

Pour composer ce dialogue entre musique et danse, Ruth Childs s’est entourée du créateur sonore Stéphane Vecchione, et iels ont travaillé dans le sens d’une synchronicité parfaite où la musique est lancée par les mouvements de la danseuse, parfois à peine entamés qu’ils sont stoppés net. On ne sait plus qui répond à quoi, le corps à la musique ou bien l’inverse. Cela lui permet des moments d’exploration, de voir quel son provoque tel ou tel mouvement, dans un registre presque clownesque par moment. La voix est également un moteur dexploration, où des phrases saccadées en anglais se superposent à la musique.  

L’autre élément principal de fantasia est la couleur. D’abord le mauve, avec un tee-shirt uni et une perruque assortie, puis la danseuse passera avec ces mêmes éléments au blanc, au vert, au rouge, et finalement au noir. Chaque couleur portée par Ruth Childs s’inscrit différemment dans le paysage, malgré la similitude des mouvements, et résonne avec les couleurs changeantes du crépuscule. La perruque change de fonction, permettant à la performeuse de jouer avec nos perceptions, et crée des personnages intrigants, tel cet animal à trois pattes avec une touffe sur la croupe. 

De ce dialogue entre mouvement, musique et couleur, présenté dans ce cadre exceptionnel, Ruth Childs nous propose un moment hors du temps dont on ressort tous les sens comblés.  

Léa Crissaud 

Infos pratiques :  

fantasia, de Ruth Childs, le 6 septembre au Parc des Evaux dans le cadre du festival de la Bâtie.  

Chorégraphie et performance : Ruth Childs 

Recherche et création sonore : Stéphane Vecchione 

https://www.batie.ch/fr/programme/childs-ruth-fantasia-in-situ  

Photos : © Marie Magnin et Léa Crissaud

Léa Crissaud

Passionnée par la culture sous toutes ses formes, Léa s’est engagée au sein du comité de La Pépinière il y a un an. Elle y coordonne aujourd’hui le Pôle Cinéma, avec la volonté de partager sa passion et de rendre l’art accessible au plus grand nombre. Elle écrit entre son travail de barista, ses études en médiation culturelle, et la coordination des cours à la Fête de la danse de Genève.

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