En quête de La Grande Nuit
Dans le cadre de La nuit est belle ! à Genève, le collectif AJAR présentera le 11 avril, à deux reprises, une lecture-performance sous la forme d’un conte collaboratif et interactif pour tou·te·s. La promesse garantie d’une soirée magique, tout au creux de la nuit, sur le Pont de la Machine.
La nuit est belle ! est un projet qui a débuté en 2019, et nous assisterons, cette année, le week-end du 11 avril prochain, à sa cinquième édition. Dans 149 communes, sur les 209 qui composent le Grand Genève, nous aurons la chance de découvrir, d’observer et d’imaginer la nuit comme nous ne la voyons que trop rarement, libérée de l’éclairage public – une pollution lumineuse qui a de graves répercussions sur la faune, la flore et la santé humaine. Afin de tisser un lien entre culture et nuit, et proposer une expérience de cette dernière, 50 animations diverses et rassembleuses sont proposées, dont la lecture-performance du collectif AJAR La Grande Nuit, un conte collaboratif et interactif.
L’AJAR, la collaboration au cœur de l’écriture
Le collectif, né en janvier 2012, réunit 15 auteur·ice·s francophones de Suisse et du Canada. Il vise à ouvrir la littérature aux autres arts et à décloisonner le livre de son support. Ses activités sont nombreuses, de la promotion d’une approche professionnelle de la production d’écriture à l’animation d’ateliers d’écriture. Dans la diversité des propositions et des créations, se trouvent presque toujours une dimension performative et une exploration de la création littéraire collective, qui viennent, entre autres, questionner le statut de l’auteur·ice, comme dans le roman Vivre près des tilleuls, publié en 2016. La performance, qui sera proposée pour La nuit est belle !, n’échappe pas à ce qui meut profondément le collectif : l’écriture collaborative, qui s’est déclinée tout au long du processus de création. À plusieurs reprises les autrices, performeuses et responsables du projet, Magali Bossi, Alice Bottarelli et Karine Yoakim-Pasquier, se sont rendues, enregistreur et micro à la main, dans les rues autour de la Rade de Genève, pour capturer des récits et rassembler des témoignages de personnes du quartier, autour de la nuit. Elles ont également rencontré des spécialistes et des profesionnel·le·s, tel·le·s Laurent Vallotton, ornithologue au Muséum d’Histoire Naturelle de Genève, Léonie Rose Marion, photographe et artiste, ou encore Jean-Marc Richard, animateur d’une émission radio nocturne, pour n’en citer que quelques-un·e·s. En parallèle, elles ont organisé des espaces d’écriture dans divers lieux, dont notamment Les Mouettes genevoises. Durant ces moments d’échanges, le public a eu l’occasion de participer à l’enrichissement à la fois du conte et de la performance. Grâce à un montage audio réalisé par Alice, une partie de ces voix prendront place au cœur de la performance, amenant une parole tantôt scientifique, tantôt drôle. Magali, qui a rejoint le Collectif en octobre dernier et que nous avons rencontrée, nous partage une anecdote : elle se souvient d’un enfant qui leur a fait remarquer, alors qu’elles étaient dans le marché de Noël, tout près des Bains des Pâquis, « que c’était quand même marrant de poser des questions sur la nuit, au milieu de toutes ces illuminations. »
Se rencontrer autour de l’imaginaire
Pour la création de cette performance, l’AJAR a été mandaté par la Ville de Genève, et plus précisément par le Service de l’aménagement, du génie civil et de la mobilité, ainsi que par l’architecte-éclairagiste Florence Colace, qui travaille avec l’ombre comme la lumière. L’envie était d’ouvrir les imaginaires sur la nuit et d’aller à la rencontre des gens par un médium artistique tout en s’inscrivant dans un projet d’urbanisme plus large : l’extinction de l’éclairage public sur une partie de la Rade. Sans trop dévoiler du conte, celui-ci nous emmènera dans une aventure à travers Genève, à la recherche de La Grande Nuit disparue, engloutie en ville par les éclairages publics. Nous y rencontrerons des animaux fantastiques et des personnages aux noms poétiques inspirés par les expert·e·s rencontré·e·s. Le conte jouera également avec l’interactivité, en s’inspirant des histoires dont vous êtes le·la héros·ïne. Le public sera invité à faire des choix, le récit étant construit avec plusieurs bifurcations possibles, ce qui représente également un grand défi conceptuel et rédactionnel en amont. Pour ces moments d’écriture, très organique, Linda Bühler (également membre de l’AJAR) a rejoint Magali, Alice et Karine. La dimension onirique, elle, sera soulignée par de la musique, avec la présence de Sylvie Bossi à l’accordéon et d’un répertoire choisi spécialement pour l’occasion.
Pour patienter jusqu’au 11 avril, et découvrir Cette Grande Nuit, j’ai envie de vous laisser avec une question qui m’a été soufflée par ce projet très inspirant : et vous, c’est quand la dernière fois que vous avez regardé le ciel ?
Charlotte Curchod
Infos pratiques :
La Grande Nuit, Collectif AJAR, Plate-forme du point de la Machine, le 11 avril 2025 à 20h30 et à 22h00.
Avec Magali Bossi, Alice Bottarelli et Karine Yoakim-Pasquier
https://www.lanuitestbelle.org/animation-2025/la-grande-nuit/
Photos : ©La Nuit est belle ! (Banner), ©Magali Bossi