Les réverbères : arts vivants

Improviser, chanter et créer une histoire : la CMI assure !

Depuis bientôt 10 ans, la troupe de la Comédie musicale improvisée (CMI) propose d’improviser une comédie musicale pendant environ 90 minutes. De jeudi à dimanche, cela se passe au douze dix-huit au Grand-Saconnex, avec un spectacle différent à chaque fois !

La comédie musicale est un exercice difficile, puisqu’il impose de mêler notamment jeu et chant, voire de la danse si l’occasion s’y prête. Imaginez donc qu’on y ajoute une difficulté supplémentaire : improviser sur un thème imposé au début du spectacle. C’est ce que se propose de faire la CMI depuis février 2012, avec son collectif de dix-neuf artistes qui jouent en alternance. Vendredi soir, au Grand-Saconnex, nous avions l’occasion de voir sur scène Mélanie Foulon, Caroline Imhof, Lionel Perrinjaquet, Quentin Lo Russo et Blaise Bersinger, accompagné·e·s au piano par Lucas Buclin. Après avoir questionné le public sur ses attentes par rapport au week-end à venir, les thèmes qui sont ressortis sont la fatigue, le besoin de repos et… un spa ! C’est ainsi qu’est né le « Spa-Psy » (ou « Psa-Spy », selon l’enseigne), dans lequel des personnes ayant subi des accès de colère viennent suivre une cure pour se détendre et évacuer la fatigue à l’origine de leurs débordements.

Construire une histoire

Il faut donc, bien sûr, construire une histoire. Et lorsqu’on impose aux cinq comédiens de jouer la scène initiale, beaucoup d’idées se collisionnent, ce qui ne facilite pas la chose ! L’histoire du soir mettait donc en scène un collectif à la fin d’une conférence sur on ne sait trop quoi, à la fin de laquelle Steve-Blaise (Lionel Perrinjaquet) a littéralement pété un plomb, puis le nez de la leader du groupe (Mélanie Foulon) en interprétant un brillant « Les gens me cassent les couilles ». Direction donc le Spa-Psy, la salle spéciale, puis le sauna et la chambre pour le moins minimaliste. On y fera la connaissance de Patrick (Blaise Bersinger), qui effectue son premier jour de travail, de la directrice (Mélanie Foulon) qui entretient une drôle de relation avec un jeune homme de vingt ans son cadet (Quentin Lo Russo), d’une employée un peu trop stressée (Caroline Imhof), ou encore du Balafré (Blaise Bersinger), qui assassiné 18 personnes avec un panneau de Pédibus parce qu’ils faisaient trop de bruit devant chez lui.

Difficile donc de créer une histoire qui se suit avec tous ces personnages, tout en insérant des chansons dont iels ne savent rien à l’avance. Lucas Buclin décide ainsi d’entamer une mélodie au piano quand il le souhaite, et sur laquelle les comédien·ne·s improvisent une chanson en rapport avec la scène qu’iels jouent à ce moment-là. Si tout ne fonctionne pas toujours à la perfection – et c’est bien normal – l’exercice donne lieu à quelques perles. On citera ainsi le potentiel tube du Spa-Psy et son entraînant refrain « Lâche prise, connard » entonné par Blaise Bersinger et Caroline Imhof, alors que Steve-Blaise subit un drôle de soin quelque peu douloureux… Ce même Steve-Blaise, lors d’un moment seul en scène de Lionel Perrinjaquet, nous aura ébloui avec une splendide tirade chantée sur son engagement communiste et la lutte contre le capitaliste. Il fallait le faire !

Traiter de nombreux sujets

Ne sachant jamais où leurs improvisations les mèneront et comment leur·s partenaire·s de jeux réagiront, les comédien·ne·s peuvent couvrir de nombreux sujets et facilement dévier de la trajectoire initiale, tout en restant dans le pitch de départ. On a déjà cité les convictions de Steve-Blaise bien sûr, mais on peut aussi évoquer d’autres sujets, plus « casse-gueule ». À commencer par la relation entre la directrice de 38 ans et son employé à peine majeur, lui-même récemment séparé d’un autre employé du Spa-Psy. L’occasion de parler de relations malsaines, à plusieurs niveaux. On trouve ainsi un drôle de rapport de domination, qui laisse à penser que l’amour n’est pas tout à fait sincère. Et puis, il y a cette histoire autour du chiffre 18 : l’âge de l’employé bien sûr, mais aussi le nombre de victimes (enfants et adultes) du Balafré avec un simple panneau de Pédibus, ou encore le nombre de morts provoqués par l’autre employée, celle qui était stressée, alors qu’une alarme retentit et qu’elle ne peut d’abord pas sortir du sauna… Faire rire avec de tels massacres – certes totalement fictifs – il fallait oser !

Car la Comédie musicale improvisée, c’est avant tout du rire et de la bonne humeur. Ce sont aussi, et surtout, des comédiens et comédiennes de grand talent, tant au niveau du chant que de l’improvisation, deux arts déjà difficiles, qui le sont encore davantage quand il s’agit de les mélanger. Leur force ? Créer un spectacle différent chaque soir, avec des artistes qui se relaient. N’hésitez donc pas à y aller plusieurs fois, sur le canton de Vaud ou lors d’un prochain passage genevois, on peut vous le garantir : vous passerez un excellent moment !

Fabien Imhof

Infos pratiques :

La Comédie musicale improvisée, du 14 au 17 octobre 2021 au Théâtre le douze dix-huit.

Avec Mélanie Foulon, Caroline Imhof, Lionel Perrinjaquet, Quentin Lo Russo et Blaise Bersinger, accompagné·e·s au piano par Lucas Buclin.

https://ledouzedixhuit.ch/spectacle/comedie-musicale-improvisee/

Pour retrouver toutes les dates de la CMI : https://lacomediemusicaleimprovisee.ch/les-prochaines-dates/

Photos : © Nadir Mokdad

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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