Les réverbères : arts vivants

La dame elle a des grands bras

Un spectacle pour des mômes qui n’en perdent pas une miette – Céleste, une fable écologique – sur une conception de Suzanne Forsell, présentée par la compagnie Zikids à l’Étincelle, Maison de Quartier de la Jonction. C’était à voir du 25 au 28 septembre 2024

Pour entrer dans le monde de l’imaginaire, il faut une porte et quelqu’un pour nous y inviter. La narratrice (Suzanne Forsell) les ouvre largement et si largement qu’elle embrasse l’entier de l’écran, déposé au milieu de la salle, tel un théâtre guignol. Les mômes commentent : « La dame elle a des grands bras ! » Ils sont impressionnés : la complicité débute.

Le récit de la fable est accompagné d’un musicien (Michael Pellegrini) et de projection d’images de sable sur l’écran (Sandy Tripet). Ces merveilleuses images magiques et éphémères tracées du bout des doigts qui convoquent l’imaginaire de chacun.

Du monde, qu’en est-il ? Il est devenu gris. Le plastique a envahi la terre et tellement que cette dernière est voilée de sable gris. La quête des deux héros, Céleste et Bakou, débute tel le voyage d’Ulysse. Ainsi de rencontre en rencontre, de personnages en personnages, les deux enfants vont, guidé·e·s par la providence, à la recherche de l’objet magique qui permettra à la terre de retrouver ses couleurs.

L’univers musical est remarquable de discrétion. Les divers instruments dont une flûte traversière s’imposent avec un juste éclat. Ainsi accompagnée, l’histoire passe de la narratrice à l’écran, de la scène à la lumière. La magie des sables retient l’attention notamment par de magnifiques arbres. Le récit linéaire et la voix séduisent entre autres au travers du délicieux vol de la libellule, toujours accompagné par les remarques des mômes.

Ce mélange de sable, de fantastique, de quête magique pour rétablir l’ordre des choses rappel encore une fois l’Odyssée et la recherche de la vie bonne et plus ancien encore, l’épopée de Gilgamesh à la recherche de l’immortalité, le retour de la vie. Des récits fondamentaux qui évoquent la lutte des hommes contre ce qui est plus fort qu’eux.

Affronter plus fort que soit, rechercher, s’augmenter, c’est ce que les deux petits personnages Céleste et Bakou tentent avec courage. Le message est simple et pas si magique que cela comme le montrent les dessins de sable ponctués de découpages de maison, d’usines, de ballon volant, de fumée d’échappement qui placent des touches de réalités. C’est un très beau travail de sculpture en deux dimensions.

Un spectacle intelligemment bien conduit. Car, trouver la solution au climat demande de l’utopie et de la réalité. Avec la vision de ce voyage que propose le trio d’artistes, il est possible de s’approprier le message en comprenant qu’il va falloir se remonter les manches.

Alors, oui, après ce voyage qui a demandé aux deux héros du courage, ces derniers trouveront l’objet magique qui ramènera les couleurs sur la terre. Parce qu’il faut être un peu candide dans ce monde et si l’on voit un réverbère, sans être naïf, on peut y voir la lune.

Les enfants, le public pendant une heure de spectacle ont vu l’astre de Pierrot.

Jacques Sallin

Infos pratiques :

Céleste, une fable écologiste – à l’Étincelle, Maison de Quartier de la Jonction du 24 au 28 septembre 2024

Mise en scène : Mirko Verdesca

Avec Suzanne Forsell, Sandy Tripet, Michael Pellegrini

Photos : ©  Sandy Tripet

Jacques Sallin

Metteur en scène, directeur de théâtre et dramaturge – Acteur de la vie culturelle genevoise depuis quarante ans – Tombé dans l'univers du théâtre comme en alcoolisme… petit à petit.

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