L’imaginaire pour pallier l’ennui
Que font les enfants qui s’ennuient quand ils sont seuls ? Ils imaginent et rêvent. Tant et si bien qu’un véritable ami peut prendre forme et, avec lui, tous les possibles. C’est ce que raconte Petitpas et moi, au TMG jusqu’au 10 mars dernier, avant d’entamer une tournée dans toute la Suisse.
Alors que sa mère s’en va, submergée par son travail, une enfant (Alice D’Angelo, en alternance avec Sandra Klimek) se retrouve seule dans sa chambre. Le décor qui l’entoure n’est composé que de tuyaux et d’une forme d’écran. Rien de bien amusant pour lui tenir compagnie, donc. Mais alors qu’elle s’endort, elle commence à rêver d’un drôle de petit être, dans son esprit, avant de lui donner réellement vie. Petitpas (manipulé par Chine Curchod) est né. Ensemble, la petite fille et lui vont s’inventer tout un monde, et la fillette de retrouver la joie, dans ce spectacle presque sans paroles.
Du jeu d’ombres à la marionnette à fils
Petitpas apparaît d’abord derrière l’écran, en ombre. Seule sa cape est colorée. À cet instant, il n’est encore qu’un rêve qui n’a pas véritablement pris forme. Une dimension de mystère s’empare de la scène, dans l’incompréhension de la fillette qui ne sait pas encore vraiment ce qui l’attend… Finalement, Petitpas débarque sur la scène, en bois et en fils ! Le nouvel ami imaginaire prend la forme d’une marionnette à fils articulée, tout simple, sans fioriture. Son allure se modifiera au fil du spectacle et de l’imaginaire de la petite fille, en lui ajoutant tour à tour une cape, des chaussons, différents chapeaux et même le même pull rayé qu’elle !
Dans cette coproduction imaginée entre les compagnies genevoise Chamar Bell Clochette et zurichoise Mafalda, on joue sur l’imaginaire à tous les niveaux. Pour preuve, l’utilisation de marionnettes de différentes tailles et le tableau d’ombres qui permet de changer toutes les perspectives. Petitpas semble ainsi d’abord faire la même taille que l’enfant, avant de se révéler bien plus petit qu’on ne le croyait. Une manière de montrer que les enfants imaginent l’inconnu toujours plus grand que ce qu’il n’est ? Quoiqu’il en soit, le fait que Petitpas reprennent une taille plus abordable par la suite permet à la petite fille de jouer avec lui, tout en montrant que l’imaginaire n’est pas figé et peut évoluer au gré des besoins et des situations. Un véritable pouvoir totalement infini.
L’imagination des enfants : d’infinies possibilités
Avec Petitpas, tous les possibles s’offrent donc à cette jeune enfant. Des tuyaux qui servaient de décor sortent mille-et-une idées et permettent de construire différents éléments. Les deux plus gros se déroulent pour devenir une toile sur laquelle seront projetées des ombres et autres dessins, pendant que des plus petits surgissent des fleurs. On les utilisera également comme instruments de musique, longues-vues ou extensions de bras… Quant aux tuyaux de taille moyenne, ils font surgir des oiseaux, papillons, décors floraux, voire même un bateau ou une boule à facettes. Avec tout cela, c’est tout un monde qui s’ouvre, entre univers marin, nature féérique et grandes aventures. La possibilité est aussi ouverte de se défouler à travers la danse. Tout est donc bien présent pour éviter l’ennui.
Mais avec tout cela survient aussi un difficile apprentissage : celui de l’amitié, avec ses désillusions, ses disputes et ses frustrations. Tout n’est pas toujours rose et il faut parfois accepter de faire des compris, laisser l’autre nous rendre ce qu’on lui donne, même quand il s’agit de taquineries qui nous déplaisent. Alors, quand la fillette boude, il faut bien que Petitpas trouve une solution pour la dérider. Les retrouvailles constituent alors le meilleur moment de la dispute ! Et la complicité est bien là !
Au final, Petitpas et moi nous convie à retrouver notre âme d’enfant – pour les plus grand·e·s – et à pousser l’imaginaire des plus jeunes, pour sortir de l’ennui qui peut rapidement nous assaillir. À nous de mettre de la couleur et de la joie dans nos vies !
Fabien Imhof
Infos pratiques :
Petitpas et moi, un spectacle des compagnies Chamar Bell Clochette et Mafalda, au Théâtre des Marionnettes de Genève du 28 février au 10 mars 2024.
Conception : Teresa Rotemberg et Chine Curchod
Avec Chine Curchod, et Alice D’Angelo ou Sandra Klimek (en alternance) et Petitpas
https://www.marionnettes.ch/spectacle/petitpas-et-moi
Photos : © Caroline Minjolle