Sur le Charroi de la Michée, au cœur des légendes genevoises
Durant tout l’été, le Charroi de la Michée parcourt les terres genevoises, faisant étape chez les vignerons pour conter l’histoire de Michée Chauderon, dernière sorcière condamnée à Genève. Le tout est agrémenté de quelques légendes genevoises, narrées avec brio par une troupe haute en couleurs !
Dans les cours de vignobles du Canton, une troupe d’acteurs et d’actrices narrent l’histoire de la Michée. Mais attention, ce ne sont pas n’importe quels acteurs et actrices, puisqu’iels interprètent eux-mêmes une compagnie du XVIIe siècle et jouent donc à la façon de l’époque, musique et danse les accompagnant tout au long du récit ! Durant une heure et demie, on suit donc le parcours de Michée Chauderon, son arrivée à Genève à la suite de son mariage, ses séjours en France, jusqu’à son accusation finale pour sorcellerie qui la conduire à une tragique exécution, la dernière en terres genevoises ! Durant ce parcours, au gré des rencontres et des lieux visités, traçant parfois de troublants parallèles avec sa propre histoire, la joyeuse troupe emmène le public dans plusieurs légendes genevoises : des amoureuses de la Pierre-aux-Dames en passant par la Dame blanche de Saint-Pierre ou encore l’énigmatique Madeleine la fileuse qui a donné son nom à un temple…
Un parcours chez les vignerons
Le Charroi de la Michée se présente donc comme un spectacle itinérant : durant tout l’été, il sillonne, avec les membres de la Cie La Mouette, les vignobles genevois pour y raconter son histoire. Les vignes et leurs exploitant faisant partie intégrante du patrimoine du Canton, quels meilleurs lieux pour transmettre ces récits, tout en dégustant de délicieux vins du cru ? Et le choix est loin d’être anodin, les vignerons véhiculant eux-mêmes des histoires, au gré de leurs rencontres, ou en étant parfois acteurs de celles-ci…
Une troupe haute en couleurs
Le succès du Charroi de la Michée tient en grande partie à l’énergie de sa troupe. Huit comédiens et comédiennes, accompagné·e·s d’une danseuse et de deux musicien·ne·s incarnent ainsi la multitude de personnages qui gravitent autour de Michée et des légendes qu’on lui narre. Le parti pris de l’auteur et metteur en scène du spectacle, Jacques Sallin, de les faire interpréter une troupe du XVIIe siècle fait mouche : iels ne tombent pas dans le piège de la caricature, tout en parvenant à reprendre les codes de l’époque. Il en va ainsi de certaines formules, de l’accent des paysans, ou encore des nombreuses mimiques qui égaient les visages de la compagnie, dont certains particulièrement expressifs, à l’image de Celtia Concha et Chaquib Ibnou-Zkri. Grâce à quelques allusions plus contemporaines et à une interaction constante avec le public, la troupe parvient en plus de cela à créer un véritable jeu avec ce dernier, amenant une énergie encore plus grande.
Bien sûr, rien ne serait possible sans le texte imaginé par Jacques Sallin et inspiré des contes et légendes genevois. Dans l’écriture, rien n’est forcé, et les légendes narrées par les comédien·ne·s s’insèrent parfaitement dans l’histoire de Michée, avec un contexte toujours bien amené, qui permet de mieux comprendre certains éléments historiques, notamment dans la perception de ce qu’on a nommé sorcellerie à l’époque.
On ne serait complet sans évoquer la musique et la danse qui accompagnent le spectacle tout du long. Ainsi, Matthieu Bielser avec ses divers instruments à vent – le cor des Alpes a été marquant pour de nombreux·ses spectateur·trice·s – et Magali Bossi à l’accordéon créent une ambiance musicale, ponctuée d’airs connus ou un peu moins, qui ravivent de nombreux souvenirs au public. On évoquera les variations autour des Quatre-saisons de Vivaldi, mêlée au classique parmi les classiques Colchique dans les prés, dans la légende du chevalier de la Pierre-aux-Dames. On apprécie également le clin-d’œil à Ennio Morricone lorsque la carriole transportant Michée durant un de ses voyages se déplace… Cette musique s’accompagne des mouvements dansés de Konstantina Fytrou, qui tantôt embarque les comédiens et comédiennes, illustre des légendes, ou crée des transitions fluides entre les scènes. On parle souvent de théâtre total, en voici un bel exemple, avec tous ces arts qui se mêlent, dans cet hommage non seulement à des événements marquants de l’Histoire genevoise, mais aussi à cette magnifique discipline que sont les arts de la scène et de la rue.
Pour le détail des légendes et de la vie de Michée Chauderon, le mieux est encore de vous rendre chez l’un ou l’autre vigneron d’ici au 28 août, date de fin du spectacle. Mais attention, victime de son succès, Le Charroi de la Michée affiche déjà presque complet…
Fabien Imhof
Infos pratiques :
Le Charroi de la Michée de Jacques Sallin, du 10 au 28 août chez différents vignerons genevois.
Mise en scène : Jacques Sallin (avec l’assistance de Carmélia Chassot)
Avec Maryline Bornet, Celtia Concha, Nathalie Gantelet, Serge Clopt, Nathalie Gantelet, Pat LaGadji, Michel Kuhne et Chaquib Ibnou-Zkri
Danse : Konstantina Fytrou (sur des chorégraphies d’Antonio Gomes)
Musiciens : Matthieu Bielser et Magali Bossi (sur des compositions de Patrick Bielser)
Scénographie : Éric Debonneville
Construction et décor : Éric Dugerdil
Costumes : Odile Thevenot
Informations, dates et réservations : https://cielamouette.ch/le-charroi-de-la-michee/
Photos : © Éric Debonneville