Au Grütli, finir le mandat en beauté
Alors que le mandat de direction de Barbara Giongo et Nataly Sugnaux Hernandez s’achèvera l’été prochain au Grütli, le Centre de production et de diffusion des arts vivants a dévoilé jeudi soir sa saison 2024. De quoi terminer cela en fête et poser les jalons pour la suite.
La saison débutera le 1er février, dans le cadre du Festival Antigel. Pour se réchauffer dans le froid hiver, le Théâtre de l’Esquisse proposera un diptyque, avec Fables et Place Saint-Sulpice. On pourra, selon les soirs, voir l’un ou l’autre, ou alors une intégrale. Avec des acteur·ice·s en situation de handicap mental, ce sont deux visions du monde qui vous seront proposées : soit avec une vision légendaire, du côté des Fables, soit dans quelque chose de plus contemporain dans Place Saint-Sulpice. Ce sera quoiqu’il en soit l’occasion d’élever son regard et d’observer la vie comme elle est, avec les gens, le ciel, la ville ou la campagne…
On continue en mars avec une proposition dans le cadre d’un autre festival, C’est déjà demain, mené avec le Loup, Saint-Gervais et l’Abri. Du 5 au 9 mars, donc, Angie Addo et Angela Aldebs proposeront une performance intitulée rabbia. Dans une mise en scène signée Savino Caruso, et l’aide au niveau dramaturgique de Gilda Laneve, questionnera la colère, que ce soit celle des artistes ou des activistes. Quand la possibilité de la montrer est un privilège, d’où qu’elle naisse, elle doit permettre d’aller l’avant et de lutter. Un spectacle qui promet des émotions.
Place ensuite, entre le 14 et le 27 mars, à Marco Berrettini et El Adaptator. Entre danse, chants, sketches et poésie sonore, le chorégraphe mettra en lumière les changements dans nos sociétés contemporaines, et toutes les contradictions que cela implique. Accompagné de la danseuse Milena Keller, iels ne chercheront pas à apporter de réponse, mais simplement à imager les questionnements qui les animent.
Après la pause pascale, Delgado Fuchs proposera un projet chorégraphique de groupe, dans TOPEEP Secrets box. Parcours initiatique pour le public, il s’agira de se déplacer dans le décor, à travers le visible et l’invisible. Dans ce dispositif inspiré du peep show, il sera question d’intimité, entre proximité et mise à distance.
Du 25 au 28 avril, le Grütli accueillera la compagnie italienne Motus, pour une revisite du mythe de Frankenstein. Frankenstein, a love story parle non seulement de la créature, mais se présente également comme elle, en donnant vie à l’inanimé, tout en décomposant et recomposant différents éléments qui inspirent le spectacle. Entre monstre et prodige, pas sûr qu’il faille choisir…
Les 16 et 17 mai, comme pour l’ouverture de saison, le spectacle sera réalisé par des personnes en situation de handicap. Dans Burn Out In Biscuit Land, la compagnie Touretteshero questionne le droit à l’existence. Trois habitant·e·s neurodivergent·e·s d’un bunker observent un monde en proie au chaos, en interrogeant les notions d’isolement, de résistance et de joie. Le tout en interaction avec l’activiste, autrice et artiste Jess Thom.
Entre le 29 mai et le 1er juin, la pièce chorégraphique Nous voulons la lune présentera trois danseuses, imbriquées comme dans un seul corps, plongeant le public dans un monde au ralenti. Marion Baeriswyl et D.C.P proposeront alors d’envisager le monde différemment, pour mieux percevoir ce qui nous relie, toutes et tous, à lui.
On retrouvera ensuite Davide-Christelle Sanvee, avec S’effrayer des chemins. Dans cette première création, elle questionne et s’insurge contre un événement qui l’a profondément marquée : alors que le camp de migrant·e·s à Calais a été démantelé en 2016, les compagnies de transport chargées de les déplacer ont protégé leurs sièges avec des housses, pour éviter que ces derniers ne soient salis. À travers cet événement, c’est la peur de l’autre qu’elle questionne, dans les transports comme dans la société.
Pour conclure leur mandat en beauté, Barbara Giongo et Nataly Sugnaux Hernandez vous convient, les 28 et 29 juin, à une grande fête intitulée Tchüss, Ciao, Bye ! Une manière de se dire au revoir, en compagnie de plusieurs artistes invité·e·s qui feront de ce moment deux soirées inoubliables !
On se retrouvera ensuite à la rentrée, dans le cadre de la Bâtie – Festival de Genève, avec L’âge de nos idées. Si les dates doivent encore être fixées, on sait déjà qu’il s’agira d’un spectacle en trois parties, portées chacune par l’un·e des trois intervenantes. L’idée ? Se nourrir de ce qu’aura fait l’autre pour questionner le rapport entre les boomers et la génération Z, en espérant mieux se comprendre les un·e·s les autres et franchir ce fossé qui paraît parfois trop profond.
Du 1er au 5 octobre, Camille Mermet nous présentera Denise. Denise, c’est cette ombre qui poursuit une femme seule sur scène, ou peut-être un double, une forme d’alter-ego. On jouera sur les apparences trompeuses, ce qu’on croit savoir de l’autre, les indicibles… Pour peut-être se rendre compte d’une réalité toute différente de celle qu’on croyait être.
C’est ensuite Pierre-Isaïe Duc qui s’emparera de l’espace, avec Apepipopup ! Une poésie de la photo de classe. Partant d’une ancienne photo, il cherche à retrouver une femme dont il ne se rappelle que le nom et le prénom. Sans s’en douter, c’est à une quête bien plus grande qu’il sera confronté : la rencontre des hommes et des femmes que ces enfants, lui compris, sont devenu·e·s.
Du 6 au 9 novembre, Clara Delorme ouvrira un nouveau volet de son travail sur les monochromes. Avec L’externat et le foyer, elle signe une anticipation funèbre, en s’inspirant des Pleureuses, dont le métier vise à pleurer à la place des autres. Un spectacle qui vise à rendre la tristesse un peu moins solitaire, le temps d’une soirée.
Enfin, l’année se conclura entre le 3 et le 19 décembre, avec JLG* VS MD*. Avec ce titre énigmatique, Louise Bentkowski et Sahar Suliman reprennent le questionnement de Godard et Duras, qui se demandaient « que fait le cinéma à la littérature ? ». En 2024, s’inspirant de cette interrogation, il s’agira de se demander ce que fait le livestream au théâtre. Un spectacle en forme de métaréflexion pour conclure, donc !
Fabien Imhof
La programmation complète et les détails de chaque spectacle sont à retrouver sur le site du Grütli – Centre de production et de diffusion des arts vivants.
Photos : © MokaMag (banner) et © Le Grütli (inner)