En avant les histoires

Objets détournés avez-vous une âme… de gosse : Boîte à gants, par La Toute Petite Compagnie, c’était à voir au Théâtre le douze dix-huit, le 6 novembre dernier.

Il y a dans ce spectacle quelque chose de Saint-Ex. C’est fait pour les mômes, mais les adultes y sont les bienvenus. On y retrouve l’auguste et le clown blanc… ça faisait bien longtemps. Un petit théâtre échappé d’un jardin public, quel bonheur !  Et des histoires qui se suivent comme des jeux à bâton rompu joués par des grands en « culottes courtes » et des mômes dans la salle qui réagissent comme au théâtre Guignol. C’est rafraîchissant. On se souvient du merveilleux guignol dans La Grande Vadrouille. Ici, les objets détournés possèdent une âme et tellement que certains deviennent des doudous, ce titre de gloire qui porte les objets à aimer au-dessus de celle des rois.

Deux personnages, Monsieur Paul (Florent Vivert – Le clown blanc) et Michel (Samuel Camus – L’auguste) passent de ville en ville, de village en village, de cour de récré en cour de récré pour retrouver les gants perdus, orphelins ou hors d’usage qu’ils placent dans leur boîte à gants. Des objets dont la perte est plus une frustration qu’un chagrin. Ainsi oubliés, ils terminent leur existence dans cet orphelinat – sûrement voisin de celui des chaussettes égarées qui pourrait être un placard de plus. Il n’en sera rien.

L’ouverture du spectacle devant une boîte à gants géante fermée, est parfaitement adaptée. Le personnage de Michel parle aux enfants avec des mots justes, de suite on ressent la maîtrise des interactions avec le jeune public. Ainsi, dès la première action, les mômes sont attentifs. Ils le seront tout au long du spectacle.

Toute boîte possède sa clé.  Ah, dam ! il faut la retrouver.  Un très joli jeu de petites portes qui s’ouvrent de chaque côté de la boîte et qui capte l’attention du public. C’est l’instant « guignol » : « Elle est à gauche… elle est à droite » ! crient les mômes en rigolant. Enfin, la boîte à gants s’ouvre comme un théâtre de baladins avec à l’intérieur tous ce dont l’imagination a besoin.

Dès lors, cette même imagination prend tout pouvoir. Elle transforme les emballages des cadeaux en bateaux ou en locomotive. C’est l’instant où le gant citrouille, devient un « roboterator », une poule, une mygale ou une tarentule.

En avant les histoires !

La force de ce spectacle est la surprise, l’inattendu. Certes c’est de l’imagination pour les mômes, mais elle est accompagnée par une très bonne connaissance des enfants, par des savoir-faire multiples. On retrouve avec bonheur des clowns musiciens, de ceux qui jouaient dans les cirques d’avant, la surprise de l’objet détourné telle une cravate en tôle qui devient un WashBoard – ces planches à laver, instrument de musique de la Nouvelle-Orléans, et des chansons tendres et amusantes. Loin d’être un fourre-tout, ici tout s’enchaîne selon la logique de l’émotion. C’est drôle, souvent burlesque à la Chaplin, virevoltant avec çà et là des bagarres pour de faux !

Parfois si prompts dans l’injonction, les enfants sont totalement happés : rien ne fuse de la salle.

Un très joli spectacle qui se termine en bataille de gants autorisée, comme une folle bataille de polochons. Les couleurs et les objets sont projetés dans la salle tel un bouquet final de feux d’artifice.

Soyez attentif, ce spectacle qui se décline aussi pour les 0-3 ans, a été joué plus de mille fois. Il repassera sûrement près de chez vous un prochain jour. Venez-y et prenez un gant solitaire avec vous. Dans cette « Boîte à gants », vous lui offrirez un avenir de saltimbanque.

Jacques Sallin

Infos pratiques :

Boîte à gants,  par La toute petite compagnie, au douze dix-huit, le 6 novembre 2022.

Mise en scène : La toute petite compagnie

Avec Samuel Camus et Florent Vivert

Photos : © LDD