Et la Marmite se brisa : épisode 38
Vous aimez les enquêtes et les énigmes ?
Vous rêvez de courir après les meurtriers, d’élucider des crimes, d’être aussi habile que Sherlock Holmes, aussi perspicace qu’Hercule Poirot ? Les interrogatoires ne vous font pas peur et les indices, c’est votre rayon ? Bienvenue dans Et la Marmite se brisa, une fabuleuse enquête de Miss Apfel !
Et la Marmite se brisa est un nouveau récit participatif lancé par La Pépinière à l’automne 2020. Entre le feuilleton et le cadavre exquis littéraire, nous avons réuni des autrices et auteurs de tous bords : amateur.trice.s, confirmé.e.s, déjanté.e.s, sérieux.ses, jeunes ou plus âgé.e.s… Après le succès de nos récits participatifs précédents (Du jardin au balcon et La Geste d’Avant le Temps), les voilà prêt.e.s à s’embarquer pour une nouvelle aventure, sans savoir ce qui les attend. Cap sur le polar helvétique !
Pour cette première aventure de Miss Apfel (qui évoque bien sûr la Miss Marple d’Agatha Christie), plongez dans les secrets historiques de Genève…
Alors, ça vous tente ?
Retrouvez le début du feuilleton ICI !
* * *
Épisode 38 : rebondissements… et chocolat
Croisement du Boulevard Helvétique et de la Rue de l’Athénée.
Le 12 décembre, 04h33.
« Il y a quelqu’un ? »
François, plissant les yeux, essaie vainement de percer les ténèbres qui l’entourent. Décidément, il n’y a aucun endroit où on puisse être tranquille pour mettre fin à ses jours !
« Je vous entend éternuer », ajoute-t-il, agacé. « Montrez-vous ! Qui êtes-vous ? »
Fouillant dans ses poches, il finit par trouver un vieux briquet, qu’il n’a plus utilisé depuis belle lurette mais qui finit par s’allumer après quelques tentatives infructueuses.
Un halo lumineux chasse les ténèbres et il aperçoit soudain une vague silhouette féminine, avachie contre la paroi du tunnel. Il s’en approche, hésitant : décoiffée, pleine de boue et de toiles d’araignées, éternuant à en avoir mal aux côtes, elle devait être (il y a quelques heures à peine) une assez agréable jeune femme, coiffée à la garçonne et vêtue d’une veste couleur pistache. Mais à présent…
Poussant un soupir et remettant à plus tard sa fin solitaire dans ce sombre boyau malodorant, François sort de sa poche son mouchoir le moins utilisé et le lui tend.
« Tenez, mouchez-vous. Qu’est-ce que vous faites ici ? Ce n’est pas un endroit pour une dame ! Et surtout pas au milieu de la nuit ! »
Dans son autre main, il tient toujours sa barre de chocolat entamée. Un coin de son esprit (celui qui n’est ni occupé par un potentiel suicide, ni par la jeune femme devant lui) espère qu’il aura le temps de la terminer plus tard. La femme attrape le mouchoir avec un reniflement sonore :
« Je suis… aaaatchaaaAAA !… allergiqaaaaaatchaAAAA !… au choc …aaaAAAaatcha !… au chocaaaatchaAAAA !… rhooo !… AAAaaaatcha !… au chocolaaaAAAaatcha ! »
« Ah d’accord… désolé, je comprends mieux… » Il range prestement le reste du chocolat dans la poche de son veston. « Je m’appelle François Loiseau. Et vous ? Je peux peut-être vous aider ? Vous me semblez mal en p… »
François Loiseau ?! En entendant ce nom, Cathy Piaget se redresse d’un bon, les yeux écarquillés, la bouche déformée par un rictus haineux. Comme un diable sautant hors de sa boîte, elle se rue sur l’infortuné François, qui recule, surpris par l’assaut de cette furie. Sous le choc, il tombe en arrière, lâchant son briquet et emportant dans sa chute la femme, qui lui serre le cou avec énergie, pour mieux l’étrangler. Aaaaarrrrgh… François lutte pour trouver de l’aide. Certes, il voulait en finir avec la vie… mais pas de cette façon ! Pas étranglé par une inconnue juste parce qu’il mangeait du chocolat ! Il y a des limites, quand même !!! Il se débat, essayant de faire lâcher prise à cette folle furieuse. Malheureusement, il sent qu’il est en train de perdre ses forces… lentement, mais sûrement… il n’est plus le jeune homme qu’il était quand il escaladait les falaises, il y a bien longtemps…
Il se sent partir… partir… mais, alors qu’il va perdre connaissance, le tunnel s’éclaire soudain et des mains puissantes agrippent les épaules de son assaillante, la forçant à le lâcher et la projetant contre la paroi du boyau. À demi-conscient, il reconnaît alors…
« Mi… Miss Apfel… »
« VOUS ! ENCORE VOUS ! »
La folle furieuse se débat, fait volte-face, les dents découvertes tandis que Miss Apfel se met en position de combat, poing relevé. Ah, les cours de self-défense qu’elle a pris il y a quelques années vont enfin lui être utiles…
« Eh oui, c’est toujours et encore moi, Cathy. Nous ne cessons de nous croiser. Je vous conseille de vous calmer. Cette fois, il faut mettre fin à vos agissements. La police sera bientôt là, l’inspecteur Tabazan est sur mes talons. C’est terminé, Cathy. »
« ÇA SERA TERMINÉ QUAND J’AURAI VENGÉ MON PÈRE !!! »
« Votre père était un brave homme, gentil, serviable et aimant. Il n’aurait jamais voulu être vengé. Et tout ce que vous pourrez entreprendre ne le ramènera pas… réfléchissez, Cathy. »
Peine perdue : Cathy Piaget ne l’écoute pas – ou plutôt, elle n’écoute que ce qui lui convient :
« C’est exact », éructe-t-elle dans un ricanement. « Mon père était comme vous l’avez décrit. Mais si je vous tue, j’aurai au moins la satisfaction d’éliminer celle qui l’a tué ! » s’écrie-t-elle en dégainant brusquement un revolver, caché dans sa poche. Le coup de feu part, droit sur Simone.
« NON ! »
La balle est arrêtée en route : François, qui s’était jeté devant Miss Apfel dans un sursaut désespéré, s’écroule.
« Halte ! » fait brusquement une voix. « Police ! Les mains en l’air et plus un geste ! »
Tabazan, suivi de trois policiers crottés par la boue et la poussière des souterrains, vient de surgir des ténèbres. Miss Apfel souffle de soulagement, partagée entre son inquiétude pour François et sa rage froide envers l’archiviste. De son côté, Cathy, profitant de la confusion, s’enfuit dans le tunnel, alors que Tabazan et les policiers sont bloqués par le corps de François…
« Vous deux, occupez-vous de lui et appelez une ambulance », grogne l’inspecteur à l’attention de ses hommes. « Vous, Miss Apfel, il faut la rattraper ! »
Tabazan, suivi d’un des policiers, s’engouffre dans le tunnel. Suivi, bien sûr, par Miss Apfel.
Sylvie Bossi
(avec la collaboration de Magali Bossi)
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Photo : © meineresterampe