Histoires entrelacées
Trois histoires successives dans le temps. Trois vies qui s’emmêlent et se distinguent. Trois générations qui se ressemblent et cherchent à se différencier. Voilà ce que propose Hélène Marquer dans La femme parfaite à voir les 6-7 et 12-13-14 septembre au Théatricul.
Elle, sa mère, et la mère de sa mère, voilà les trois histoires à suivre dans cette pièce d’Hélène Marquer. Un chemin vers soi qui passe par les autres, par les héritages laissés par les générations précédentes et par les failles que l’on reproduit. “Vous parler de ma mère ? Je sais pas, moi. J’ai pas grand-chose à dire à propos de ma mère. J’imagine que c’est un peu comme pour tout le monde. C’est pas facile. C’est ma mère.” (Hélène Marquer, extrait de La femme parfaite). C’est ainsi qu’est introduit le lien entre les histoires racontées dans ce texte d’une grande finesse de description des sentiments humains des 3 personnages.
Laquelle de ces trois femmes est donc en train de parler maintenant par la bouche de la comédienne ? vous demanderez-vous souvent. La mère ? la fille ? la mère de la mère ? Probablement les trois vous répondrai-je. Le texte permet de discerner trois histoires différentes mais avec les mêmes sentiments, les mêmes failles et les mêmes aspirations. A-t-on vraiment besoin de savoir laquelle des trois souffre à cet instant de la pièce ? Laquelle rit ? Laquelle chante ? Elles ont sûrement les trois souffert, ri et chanté. Cet entremêlement est la plus grande force de cette pièce. Si la distinctions des générations était claire et précise, le message et la possibilité d’en tirer une leçon de vie pour soi en serait trop amoindrie.
Les propos sont excellemment servis par le jeu de la comédienne qui passe du rire aux larmes de détresse et du calme à la colère au gré des mots. Avec un jeu de lumières qui accentue encore ses tremblements émotionnels d’une humanité profonde.
Un tel talent se passe de décor sans soucis, raison pour laquelle le public notifie à peine l’absence de fond et le minimalisme des accessoires composés de trois chaises et deux feuilles de papier. Une épuration qui contraste avec l’extérieur du théâtre, qui expose les photos de la comédienne-dramaturge avec goût et qui a recouvert les lieux de bateaux en origami.
Ces bateaux sont centraux dans la pièce, de par l’obsession de la mère pour l’origami et l’impact sur sa fille d’abord, le rappel des voyages de la mère de sa mère ensuite. et enfin avec l’histoire du petit bateau, une histoire pour enfants racontée de génération en génération. Ces bateaux sont le fil rouge entre les générations, l’élément concret qui distingue et emmêle à la fois ces femmes dans leur récit de vie.
Si vous allez voir La femme parfaite, si vous osez entrer dans leurs intimité, ne cherchez pas à tout savoir et à tout comprendre, vivez l’instant présent, suivez-les avec avidité et laissez vous porter.
Lisa Rigotti
Infos pratiques :
La femme parfaite, d’Hélène Marquer, du 6au 14 septembre 2024 au Théâtricul.
Mise en scène : Jérémy Guérard
Avec Hélène Marquer
Photo(s) : © Hélène Marquer (banner et inner 1), © Lisa Rigotti (inner 2)