Les réverbères : arts vivants

« J’vous raconte ? Allez, j’vous raconte ! »

Le Collectif BPM est de retour à la Maison Saint-Gervais, avec un nouvel épisode de sa Collection. Cette fois-ci, iels mêlent Soirée diapo et  Roman photo, avec un retournement de situation totalement inattendu, façon thriller…

« Tout avait commencé par une banale soirée diapo ». C’est avec ces mots affichés à l’écran, comme dans un roman photo, que tout commence. Et effectivement, nous retrouvons trois ami·e·s qui s’installent devant l’écran où seront projetées les fameuses diapositives. Immédiatement, le ton est donné : on retrouve le gag des chaises, où l’on prend un temps infini pour s’installer correctement ; on revoit trois fois la même diapositive avec une histoire différente ; les anecdotes, toutes plus banales les unes que les autres, s’enchaînent… On retrouve le côté absurde qu’on aime dans les spectacles du collectif BPM. Petit à petit, pourtant, cette hilarante soirée diapo prend une autre tournure, et le roman-photo s’installe, avec une histoire tout à fait abracadabrante, quand les trois protagonistes se rendent compte qu’ils ont passé des vacances au même endroit, qu’iels connaissent des personnes en commun. Sans oublier cette photo d’un certain Daniel, qui n’était pas un héros, qui revient souvent. Tiens, tiens…

Le pari de la comédie

Pour la première fois dans La Collection, les trois protagonistes portent des costumes colorés : Catherine Büchi en vert, Léa Pohlhammer en rose et Pierre Mifsud en bleu. On n’en comprendra la signification qu’à la fin, mais ne comptez pas sur moi pour vous donner le fin mot de cette histoire. Dans ce nouvel opus de La Collection, on est marqué·e avant tout par l’humour omniprésent, entre gags visuels, jeux de mots et décalages hilarants. On pourra évoquer ce moment où Pierre raconte la vie qui grouille sous les rochers d’une zone désertique près de Valence, alors que la diapositive projette sur lui des ombres qui évoquent cette vie grouillante. On pourra aussi parler de cette anecdote sur un ranch, où les doubles sens autour des cheveux et des chevaux s’enchaînent inlassablement. Ou encore cet accent un peu foireux proposé par Catherine, qui raconte son père Gérard le Québécois, comme on avait coutume de l’appeler.

Avec ce parti pris de la comédie, à parti de soirées qu’on a toutes et tous vécu, le collectif BPM propose un étonnant moment de théâtre, un véritable OTNI. Chacun·e s’ennuie devant les anecdotes des autres, mais ne peut s’empêcher de raconter les siennes, quitte à faire jouer aux autres les rôles de celles et ceux dont il est question. Même si cela semble parfois tourner en rond, ces histoires d’apparence banale s’avèrent hilarante, et nous révèlent aussi quelques indices sur le dénouement de cette drôle d’intrigue.

Un Roman photo comme un thriller

Les épisodes précédents étaient bien séparés, proposant à chaque fois deux histoires bien distinctes. Pour ce nouvel opus, le collectif BPM a choisi de déroger à la règle, en mêlant les deux thématiques. Le roman photo apparaît ainsi d’abord de manière visuelle, avec ces phylactères résumant certaines situations à l’écran. On retrouve également certaines poses arrêtées, comme lorsque les trois protagonistes se servent à boire, où se retournent vers le public pour montrer leurs moues sceptiques et surprises face à tout ce qui arrive… Les codes du roman photo sont ainsi tout à fait respectés, tout en présentant une dimension théâtrale plus vivante. Le scénario totalement abracadabrant contraste avec la platitude des anecdotes racontées, revenant aux deux pistes potentielles du roman photo.

Le tout amène un certain suspense, et le public commence à recoller les morceaux avant que les trois personnages n’y parviennent. On en profite aussi pour jouer avec la narration affichée, qui devient des indications de jeu, façon didascalies. On sent alors tout l’amusement avec lequel le trio propose ce spectacle, et la complicité qui les anime. On se dit alors que cette histoire, si rocambolesque, n’est pas à prendre au sérieux. Pour autant, il y a une forme de nostalgie à évoquer ces soirées comme on en a vécues, et tous ces souvenirs qu’on partage à nos amis. Un vrai beau moment de théâtre, drôle, divertissant, et placé sous le signe du partage.

Fabien Imhof

Infos pratiques :

La Collection – la soirée diapo et le roman photo, par le collectif BPM, du 3 au 14 décembre 2024 à la Maison Saint-Gervais, puis reprise les 20 et 21 mars 2025 à l’Usine à Gaz de Nyon.

Écriture, conception et interprétation : Catherine Büchi, Léa Pohlhammer et Pierre Mifsud

https://saintgervais.ch/spectacle/la-collection-4/

https://usineagaz.ch/event/la-collection/

Photo : ©Léa Pohlhammer

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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