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L’apparition

« Je suis moi par habitude, comme une salle d’auberge vide qui se souvient de ses hôtes absents, comme un carrefour abandonné. La pluie va venir. » (p. 49).

Air de la solitude, c’est avant tout l’histoire d’un fantôme. À travers son œuvre poétique en prose lyrique, Gustave Roud, figure majeure de la poésie suisse, nous emmène sur les traces d’un poète en errance, qui arpente la campagne vaudoise du Haut-Jorat. Il y apparaît comme un esprit, à l’écart du monde, à la manière des poètes romantiques. Cette édition inclut également des photos prises par l’auteur, qui témoignent de sa fonction d’observateur et de sa passion pour sa région. Mais elles attestent aussi et surtout son amour pour les paysans inatteignables qui y travaillent, incarnés par la figure érotisée d’Aimé, qui traverse son œuvre.

Dans cette promenade d’un automne à l’autre, faite de réminiscences et de réflexions métaphysiques, le poète explore des thèmes variés dans un style simple et sans prétention, qui, loin de desservir le pouvoir de son écriture, lui donne un charme éthéré. Dans « Adieu à une route morte », le poète se demande si « nous pourrons sauver nos souvenirs » (p. 79), à mesure qu’il déplore le paysage autrefois familier qui disparaît devant ses yeux. La solitude est également centrale : pareil à un spectre, le poète a pour seule compagne la nature, la « pauvre anémone à [ses] pieds », qui est « le dernier être qui [lui] ait fait l’aumône d’un regard » (p. 103). Cette solitude tient aussi à la différence due à l’homosexualité de l’auteur, qui l’empêche de trouver pleinement sa place dans le monde.

Loin de nous désespérer, le poète nous tourne aussi vers l’avenir, vers l’espérance et la « certitude d’un miraculeux Futur imprévisible… » (p. 73).

Valérie Fivaz

Références :

Gustave Roud, Air de la Solitude, Genève, Editions Zoé, 2022, 208 pages.

Photos : ©Valérie Fivaz (couverture), © jplenio (banner)

La Pépinière

« Il faut cultiver notre jardin », disait le Candide de Voltaire. La Pépinière fait sienne cette philosophie et la renverse. Soucieuse de biodiversité, elle défend un environnent riche, où nature et culture deviendraient synonymes. Des planches d’une scènes aux mots d’une page, des salles obscures aux salles de concert, nous vous emmenons à la découverte de la culture genevoise et régionale. Critiques, reportages, rencontres, la Pépinière fait péter les barrières. Avec un mot d’ordre : jardinez votre culture !

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