Le théâtre débarque à la campagne
La première édition du festival Théâtre en campagne se tiendra du 10 au 12 juin à Presinge. Fabien Imhof a rencontré les deux comédiennes à l’origine de ce projet : Charlotte Chabbey et Carole Schafroth.
La Pépinière : Bonjour à vous deux et merci de me recevoir ! Pour commencer, pourquoi organiser un tel festival à la campagne ?
Charlotte Chabbey : Je suis originaire de Presinge, où j’ai fait partie de la troupe amateure étant petite. Ma famille vit toujours là-bas, je garde donc un lien avec ce lieu. J’avais envie d’y revenir, mais comment ? Le théâtre est ma vie aujourd’hui, je voulais le faire sortir des murs et je pense que c’est le bon moment pour aller vers les gens, prôner les rencontres. Presinge a sonné comme une évidence et fait le lien entre beaucoup de réflexions personnelles et professionnelles. La commune s’est tout de suite montrée très soutenante. Et puis, avec Carole, on a fait l’école Serge Martin ensemble, et on a déjà porté plusieurs projets de compagnie ensemble.
Carole Schafroth : Exactement, on a confiance l’une en l’autre, on a l’habitude de travailler ensemble, et on sait qu’on va toujours au bout de ce qu’on fait. Avec nos diverses expériences accumulées, que ce soit dans le social, des associations, des compagnies ou des festivals, on a un panel de tout ce qu’il faut pour accueillir le public. On a envie que tout le monde soit content, que ce soit les spectateur·trice·s ou les troupes. On veut que ce festival soit véritablement un événement, même pour celles et ceux qui n’assisteraient à aucun spectacle. L’objectif est d’investir les lieux, de profiter de la campagne, bref, de créer un moment convivial et plein d’échanges !
La Pépinière : Concernant la programmation, comment avez-vous décidé quels spectacles accueillir, et que pouvez-vous nous en dire ?
Charlotte Chabbey : On a la chance d’être très complémentaires comme spectatrices ! On n’aime pas toujours les mêmes choses, ou du moins, on n’a pas les mêmes sensations face à un spectacle. On voulait trouver des spectacles qui rassemblent, tout en respectant les contraintes du festival : ne jouer qu’un soir et donc être facilement montables et démontables dans une salle polyvalente. Il nous fallait donc des spectacles légers et qui soient encore en tournée. Sans oublier que pour la technique, on avait besoin de quelqu’un. Rémi Scotto Di Carlo nous a donc rapidement rejointes comme troisième personne à la base de l’organisation.
Carole Schafroth : On a voulu axer sur le local, avec des personnes de Genève, de la région ou qui en sont originaires. À l’exception de la Cie Uéuéué, pour Oooh Teresina, qui vient d’Italie et de France (on va dire qu’on est à mi-chemin, donc c’est local ! rires). On a réussi à proposer un panel d’à peu près tout ce qui peut se faire au théâtre : le conte, la marionnette, l’improvisation, des lectures, des adaptations, du seul-en-scène…. On veut ainsi parler à différentes sensibilités, avec des spectacles emplis d’humour, mais aussi plus sensibles, comme Correspondances. L’idée est vraiment d’avoir un festival tout public et très humain en même temps !
La Pépinière : Il y aura donc des choses prévues pour les enfants en particulier ?
Carole Schafroth : Disons pour les enfants et les adultes non-accompagnés, dans le sens où, comme cela se fait beaucoup, les spectacles sont adaptés aussi aux enfants, avec plusieurs clés de lecture possibles. Ce sont aussi des moments de partage, avec les enfants qui rient en voyant leurs parents. On aime ce côté intergénérationnel. Pour les enfants, on a aussi mis en place une garderie ! Je suis moi-même jeune maman, et on avait envie que les parents puissent venir en ne payant que le billet, sans se prendre la tête pour engager une baby-sitter en plus. Et ce ne sera pas une simple garderie, puisque plein d’animations seront organisées pour les enfants inscrits, entre 4 et 10 ans !
La Pépinière : En plus des spectacles, il y aura donc plein d’autres choses à faire, si je vous suis ?
Charlotte Chabbey : Oui ! On propose des initiations au théâtre, pendant une heure à chaque fois, soit avec Lia Leveillé Mettral (qui jouera dans Tapis rouge, le spectacle d’improvisation) ou avec moi. C’est une autre façon de partager, c’est libérateur et ça permet de sortir de l’appréhension. D’ailleurs il existe déjà à Presinge des ateliers théâtre proposés par la Compagnie Open Scènes, qui donne des cours chaque semaine.
La Pépinière : J’imagine qu’il doit y avoir du stress, mais aussi beaucoup de joie à l’approche de cette première édition du festival ?
Charlotte Chabbey : On est vraiment fières de la programmation, mais aussi du nombre de personnes qu’on a pu inclure : on est 9 dans l’équipe, avec en plus 22 artistes programmés. Cela crée non seulement de l’emploi, mais aussi de la confiance ! Sur place, il y aura une buvette, et les deux restaurants du village seront aussi partenaires. Sans oublier les bénévoles qui seront là pour encadrer le tout ! On en cherche d’ailleurs encore pour le dimanche…
Carole Schafroth : J’ajouterais qu’on propose des tarifs préférentiels de maximum 15 francs par spectacle ! Il y a aussi des abonnements pour tout le week-end, ou alors juste pour le samedi ou le dimanche. Toutes les infos se trouvent de toute façon sur le site et nos réseaux sociaux (Instagram, Facebook…)
La Pépinière : Et pour parler plus concrètement des spectacles, sans trop en dévoiler, que peut-on en dire ?
Charlotte Chabbey : Comme on le disait, il y en aura pour tous les goûts ! Avec Oooh Teresina, on reviendra à l’origine de la marionnette, avec Pulcinella, le guignol italien. Ce sont des marionnettes à gaine, qui sont historiquement très politisées. L’emploi de ce subterfuge permet un décalage… et donc d’en dire beaucoup plus ou du moins différemment qu’avec des acteur·trice·s. Avec Correspondances, on embarquera dans des lectures de lettres écrites pendant le confinement, et qui devraient rappeler à tout le monde certaines émotions ou sensations… Sans oublier le drôlissime Monique, Jean, Claudine et les autres, qui nous rappelle qu’on peut tout faire et s’amuser sur une scène ! Et toute la journée, on pourra assister au Roitelet huppé, dans la Boîte à images : dans une roulotte, sous casque, on entre dans l’univers de cette magnifique troupe, par la musique et les voix qui nous guident. C’est vraiment sensible et beau.
Carole Schafroth : Le festival s’ouvrira avec Photographe en liberté, entre one-man-show et expo : on va rire avec un explorateur touche-à-tout, qui propose à lui tout seul tout un panel de ce qui peut se faire sur une scène ! A contrario, dans Transformations, on sera véritablement embarqué dans un autre univers, fait, comme le titre l’indique, de transformations, de couleurs, de formes… Et puis, il y a le spectacle d’impro, joué par trois professionnel·le·s, j’insiste là-dessus ! Parce que pour beaucoup de personnes, l’improvisation ne se travaille pas, et pourtant… Le projet ? Deux parmi les trois – on ne sait pas lesquels – auront préparé un canevas et le troisième débarque et doit entrer dans leur projet, avec toutes les contraintes que cela implique…
La Pépinière : Charlotte et Carole, un grand merci ! On se réjouit de découvrir tout cela et de voir ce théâtre hors les murs !
Propos recueillis par Fabien Imhof
Infos et réservations : https://www.theatreencampagne.ch/
Photo : © Capucine Léonard-Matta