Les réverbères : arts vivants

Les jeunes artistes se mettent Au Parfum

Tremplin pour jeunes artistes, la quatrième édition de Au Parfum se déroulera du 23 au 27 janvier à la Parfumerie, sous la direction de Basile Campanelli et Evelyne Castellino. L’occasion de découvrir huit courtes pièces de dix minutes par des artistes émergent·e·s.

Depuis 2018, le tremplin Au Parfum propose à de jeunes créateur·ice·s de présenter des versions brèves de spectacles. Huit pièces seront ainsi jouées, pour la quatrième fois, par de jeunes passionné·e·s issu·e·s de l’école Serge Martin, de la Manufacture, du Théâtre populaire romand, des stages Serge Martin, de la Bande J ou encore de la Boîte à nez. Toutes et tous sont en cours ou à la fin de leur formation, qu’iels soient comédien·ne·s, acrobates, danseur·se·s ou musicien·ne·s. Comme de coutume, un ou deux membres du collectif de la Parfumerie – cette année Basile Campanelli et Evelyne Castellino – s’occupent du choix des dossiers et de la programmation des représentations.

Désolé, c’est comme ça… C’est ainsi que se nomme le projet porté par Léon Boesch, Alix Henzelin, Marion Agoston et Nelson Duborgel. Issu·e·s de quatre écoles différentes, iels se questionnent sur ce drôle d’objet qu’est le guichet. De facto, il crée une frontière entre la personne qui demande un service et celle qui peut le lui fournir. S’amusant des interactions entre les deux côtés de cet espace totalement artificiel, iels reprendront des situations qu’on a tou·te·s vécues : le manque d’amabilité du personnel, l’insistance pour parler dans l’interphone, l’absence du colis qu’on était venu récupérer… « En 10 minutes, on n’aura jamais le temps de sauver le monde. Mais peut-être qu’on pourra essayer d’en être curieux[1] ? »

Katia Ritz s’inspirera de son côté de La Chute de Camus, à travers des questionnements sur l’équilibre entre l’introspection et le blâme, l’amour de soi et la vanité, ou encore l’Autre et soi-même. Elle tend ainsi à interroger l’individualisme, à travers ce qu’elle veut être une fresque de l’humanité et ses travers : peur, lâcheté, envie d’être aimé·e ou compris·e… Sans jugement ni glorification, c’est avant tout la compréhension qu’elle cherche, au-delà du rire ou de la honte. Pour une amélioration de notre condition ? Parachute, un monologue qui « n’empêche pas le saut, mais lui promet une bouée. »

Loin de l’humain, c’est à l’immobile et à ce qui ne parle pas que Fjolla Elezi et Félicia Baillifard s’intéresseront, en reprenant leurs Voix pigmentées, qui avaient connu leur premier éveil dans les locaux de l’école Serge Martin. Que peuvent bien avoir à nous dire des tableaux et portraits qui n’ont pas la capacité de parole ? Dans les dix minutes qui leur seront accordées, les deux jeunes artistes tenteront de donner une voix à différents tableaux, en réfléchissant à leurs potentiels sujets de discussions, à ce qu’ils ont à dire en 2023, eux qui ont été peints à une époque bien loin de la nôtre. Ou comment questionner les incompréhensions entre les époques.

Valentin Scavino, Teo Raccordon, Julian Linn et Luca Leone, anciens membres de la Bande J, qui connaissent donc bien les lieux de la Parfumerie, nous plongeront dans un passé un peu moins lointain que le précédent. Leur volonté ? Présenter une pièce radiophonique, en interrogeant le rapport entre les comédiens, techniciens, et musiciens, avec tout le contraste entre corps et voix que cela implique. On ne pouvait pas faire plus emblématique de La Guerre des mondes. Dans cette version condensée et traduite, ils chercheront à raconter les États-Unis des années 30-40, le rapport au mythe et à la diégèse, au travers de cette fiction devenue mythique.

Et si les araignées parlaient ? C’est la thèse avancée dans L’enquête des acouphènes ou les chanteuses silencieuses de Vinciane Despret, de laquelle s’inspire librement le collectif RrA dans rotules. Après le magnifique 31 requiem 33, Alice et Lucien Thévenoz, accompagné·e·s de Cyan Huescar proposeront une enquête thérolinguistique (étude des langues non-humaines) qui se développera telle une toile d’araignée pour basculer, pourquoi pas, dans une forme de film policier…

« Grandir, c’est pour les grands ! », nous dit Lilas Morin dans Simon. Avec ce spectacle dès 5 ans, entre cirque, théâtre et chant, c’est à l’univers un peu loufoque du personnage éponyme qu’elle nous convie, face à un monde qu’il ne comprend pas vraiment. Simon, c’est l’histoire de la transition d’un enfant qui grandit et se confronte de plus en plus au réel. Mais comment faire pour garder son imagination intacte et surtout son insouciance quand le monde autour nous en empêche ? Une étape qu’on a toutes et tous connu, malgré nous.

Cinq danseur·euse·s s’allieront ensuite dans Zone de traverse. Le collectif Pampeliška (Pissenlit en tchèque) propose un projet autour de la cabane, qu’elle soit réelle, inspirant la scénographie, ou plus symbolique, à la façon des constructions qu’on se fait, mentalement, syntaxiquement ou dans nos représentations. À travers la notion d’artisanat, centrale dans le spectacle, iels veulent donner de l’espace à l’espace et du temps au temps. Ce sont finalement les relations et connexions entre les êtres, ces cabanes, l’environnement, le public, bref tout ce qui les entoure, qui les intéresse dans cette pièce où la dimension scénique sera centrale.

« On ne peut plus rien dire », s’exclame la compagnie Zygomatiks. Composée de quatre jeunes artistes en formation, elle se questionne sur la censure, en rêvant un monde où elle n’existe pas. Quatre conquérant·e·s se mettront en quête de cette utopie, bravant combats et obstacles. Personne n’étant jamais revenu d’une telle mission, que leur arrivera-t-il ? Sans reprendre totalement le spectacle On ne peut plus rien dire, iels tenteront d’en reprendre les grandes lignes, les personnages et les sujets dans les dix minutes imparties.

Alors, envie de vous mettre vous aussi Au Parfum ? C’est à la Parfumerie que cela se passe, du 23 au 27 janvier prochains !

Fabien Imhof

La programmation détaillée, les horaires et les détails de chaque spectacle sont à retrouver sur le site de la Parfumerie et la page de l’événement.

Photos : © MokaMag (photo de la Parfumerie) et © La Parfumerie (affiche)

[1] Toutes les citations sont extraites des différents dossiers de présentation des spectacles.

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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