L’oiseau sort de son œuf
Dans le cadre du festival Emergentia, dédié aux nouvelles créations chorégraphiques, Timéa Lador nous proposait Parade au Pavillon ADC, un solo inspiré par les rituels de séduction des oiseaux.
C’est donc un œuf qui nous attend sur scène quand on entre dans la salle du Pavillon ADC. Un drap enroulant un corps qui commence à se mouvoir lentement, par à-coups, comme les coups de bec pour casser la coquille. L’œuf recule, et recule, jusqu’au fond de scène, et la coquille se déploie, jusqu’à ce qu’un drap blanc occupe tout l’espace scénique. Ce ne sera pas le moment du dévoilement, il faudra patienter pour que l’oisillon pointe le bout de son bec. Quand on le voit enfin, c’est un oiseau tout duveteux au bec pailleté, et aux gestes saccadés mais très précis, qui joue avec l’écho de la musique, avant de regagner son nid.
La musique occupe une bonne partie de l’espace scénique, et Timéa Lador joue avec, comme si elle la faisait résonner d’un bout à l’autre de la salle, découvrant les limites de son territoire. L’univers musical évoluera en même temps que l’oiseau, avec des moments d’emphases et de joies et des parties plus dramatiques, jusqu’au final enflammé. La scénographie est simple, avec un large drap blanc qui se transformera au cours de la chorégraphie, que ce soit en œuf, en nid, ou en ailes. Un perchoir composé d’enceintes empilées termine cette scénographie minimaliste.
Les costumes sont le point fort du spectacle, créés par Julia Botelho, où le duvet de l’oisillon est parfaitement retranscrit, et les masques qui se révèlent au fur et à mesure sont magnifiques. La robe blanche à volant sert bien la danse, elle volette autour de Timéa Lador, tout en gardant des plumes sur le torse. Mais finalement, c’est quand la jeune danseuse tombe les masques et nous révèle son visage très expressif, dans un face à face avec le public à la fin, que les émotions sont vraiment transmises. C’est donc à visage découvert qu’elle nous offrira un final explosif, où se déploieront tout le talent et l’expressivité de Timéa Lador.
La danseuse s’est inspirée des écrits de Vinciane Despret, et surtout du livre Habiter en oiseau. Elle questionne la façon d’être en relation et d’habiter le territoire, autrement que par le prisme humain. Cela induit la recherche d’une autre temporalité, où tout est dans la lenteur et la création d’ambiances, et cela est parfois difficile à appréhender par le spectateur. Car malgré cette invitation à changer de paradigme, on se perd dans les significations que le mental humain cherche à poser sur ce qu’il se passe sur scène, jusqu’à ce que l’émotion trouve son chemin pendant le final.
Léa Crissaud
Infos pratiques :
Parade, de et par Timéa Lador, les 30 octobre et 1er novembre 2024 au Pavillon ADC.
Présenté dans le cadre du festival Emergentia, du 30 octobre au 11 novembre 2024.
Photos : ©Neige Sanchez et Gregory Batardon