Les réverbères : arts vivants

On retourne au Chelsea Hotel

Après une première session parfaitement réussie l’an dernier, le Chelsea Hotel est de retour au douze dix-huit, avec une nouvelle enquête et un·e improvisateur·ice invité·e à chaque représentation, qui découvrira l’affaire directement sur place.

New York. 1975. Le Chelsea Hotel doit accueillir la grande magicienne Harley Storm pour son grand show. Seulement voilà, elle reçoit depuis peu des menaces. L’inspecteur Reynolds (Christian Baumann), toujours fidèle au poste, est sur le coup. Dimanche soir, son acolyte se nommait Dolores Portobello (Selena Hernandez, invitée du soir). Ensemble, iels ont dû retrouver l’auteur, ou l’autrice, des menaces. S’agissait-il de Victoria Sinclair (Estelle Zweifel), qu’Harley Storm venait remplacer après cinq ans de bons et loyaux services ? Emilie Jenkins (Nina Cachelin), l’assistante d’Harley, dont l’un des précédents employeurs, Magic Jean-Luc, avait succombé à un accident en pleine représentation ? Richard (Laurent Baier), ancien amant éconduit d’Harley ? Ou bien Mister Bard (Paul Berrocal), le « magic killer », encore traumatisé d’un mauvais tour subi dans son enfance ? L’enquête qui s’est improvisée sous nos yeux devait viser à démêler le vrai du faux, grâce aux nombreux indices disséminés durant toute la représentation.

Une recette qui fonctionne

La précédente série de représentations, il y a un peu plus d’une année, avait fonctionné à merveille. On apprécie donc de retrouver la même troupe, et les mêmes personnages, bien que leur description, toujours portée par l’excellente voix-off de Tony Romaniello, metteur en scène, ait quelque peu changé. Les éléments qui ont fait le succès de Chelsea Hotel sont ainsi repris. On retrouve le décor de cet hôtel ancien, qui évolue au fil de la pièce, pour que la réception laisse place à des chambres, puis au bar dans lequel il faudra rendre le verdict final. Une trame est imaginée au début, comme dans une pièce classique, jusqu’à l’arrivée de la nouvelle recrue de la police. C’est à partir de là que tout peut changer. Dimanche, Selena Hernandez a donc choisi de s’appeler Dolores Portobello, une policière toute fraîche dans le métier, reconvertie après une carrière de coiffeuse. C’est qu’elle ne supportait plus le contact humain, la pauvre. Parler à longueur de journée avec ses clients, quel calvaire !

La trame de l’histoire est donc imaginée par la troupe. C’est ensuite en fonction des interventions de la nouvelle inspectrice – ou inspecteur, selon les soirs – que les choses évoluent. Une question nous taraude alors : le ou la coupable est-iel toujours le même ? Ou cela varie-t-il chaque soir, de manière à créer une certaine confusion et permettre de plus grandes possibilités d’improvisation ? Pour y répondre, il nous faudrait évidemment revoir la pièce… En tout cas, on se dit qu’il serait possible de changer de coupable à chaque fois, toutes et tous ayant un mobile valable et des indices en leur défaveur. Pas facile, dès lors, d’assembler les pièces du puzzle.

Un véritable concept d’impro

Ce qu’on apprécie particulièrement dans Chelsea Hotel, c’est cette capacité à inventer un nouveau concept d’improvisation. On connaissait les matchs classiques, bien sûr, mais de nouvelles idées germent chaque année. Cette enquête, avec un·e invité·e différent·e chaque soir apport un vent de fraîcheur bienvenu. On retrouve ainsi, comme au théâtre, une histoire avec un fil rouge continu, tout en apportant une part d’inconnu. Les petits travers de l’an dernier, qui consistaient à laisser parfois l’invité·e un peu seul face à l’enquête, ont été gommés. Cette fois-ci, l’inspecteur Reynolds n’hésite pas à donner quelques pistes pour l’enquête, bien que celle-ci doive finalement être menée par l’improvisateur·ice du soir.

Au final, bien qu’on imagine que cela dépend de l’énergie de chaque soir, on est toujours surpris·e de la tournure que prennent les événements. Selena Hernandez nous a régalé·e·s en entrant très vite dans le jeu de ses acolytes, reprenant des détails évoqués précédemment pour les retourner contre eux. Si bien qu’iels ont eu du mal à la piéger et à la mettre dans des situations parfois compliquées. On a d’ailleurs particulièrement adoré sa volonté d’avoir, comme tou·te·s les autres, son moment souvenir-émotion, dans lequel elle pouvait raconter un événement tragique qui l’aurait conduite là où elle est. Elle en a joué, jusqu’à ce qu’enfin, alors qu’elle ne s’y attendait plus, cela survienne. Et quelle joie de la voir exulter à la fin de la représentation, heureuse d’avoir trouvé le ou la (on ne vous le dira pas !) coupable et surtout, d’avoir contribué à ce magnifique spectacle. Les éclats de rire ont fusé, et l’important est sans doute là !

Fabien Imhof

Infos pratiques :

Chelsea Hotel, par la Compagnie les Arts, au théâtre le douze dix-huit, du 6 au 22 novembre 2024.

Mise en scène : Tony Romaniello

Avec Laurent Baier, Christian Baumann, Paul Berrocal, Nina Cachelin, Estelle Zweifel et un·e invité·e (Selena Hernandez le 10 novembre)

https://ledouzedixhuit.ch/spectacle/chelsea-hotel/

Photos : ©le douze dix-huit

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

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