Les réverbères : arts vivants

Raconter la vie en musique dans Playlist

Troisième interview de la saison dans le cadre de notre partenariat avec le Théâtre du Loup ! Alors que Playlist est en cours de création, Fabien Imhof s’est entretenu avec Léa Pohlhammer, conceptrice de ce projet qui germe dans son esprit depuis longtemps déjà.

La Pépinière : Léa, bonjour. Vous disiez lors de la présentation de saison que votre vie est rythmée par la musique, que vous en écoutez tout le temps. C’était une évidence de monter un spectacle autour de cette thématique ?

Léa Pohlhammer : Quand je suis sortie de l’école en 2002, j’avais déjà cette idée en tête, mais je ne savais pas encore que j’allais faire de la mise en scène plus tard. Petit à petit, on m’a sollicitée pour mettre de la musique en soirée, mais je ne me considère pas pour autant comme une DJ. Plus tard, lors de la première saison de Natacha Koutchoumov et Denis Maillefer à la Comédie, ils m’ont demandé de mettre la musique lors des soirées de premières des spectacles. C’est dans ce cadre que j’ai discuté avec Natacha Koutchoumov de cette idée de spectacle, qui a tourné et tourné dans ma tête. La musique procure tellement d’émotions… On va s’appuyer sur des morceaux pop, au sens très large du terme.

La Pépinière : À la lecture du synopsis, on reconnaît plusieurs chansons et artistes, comme Madonna, Queen, Bibie… Un univers assez éclectique donc. C’était une volonté de parler à tout le monde ?

Léa Pohlhammer : Même pas forcément. L’idée de base était que tout ce qui serait dit sur scène serait des extraits de paroles de chansons, sans pour autant recréer des dialogues. J’ai d’abord cherché dans la musique que j’aime, mais j’ai dû faire le tri, parce qu’il est parfois difficile de trouver une forme de théâtralité dans certains morceaux, comme ceux de Madonna… Au contraire, j’ai été surprise de découvrir de la matière chez d’autres chanteurs, comme George Michael. Finalement, ce ne sont pas les grands tubes qui me parlent. Et ce ne sera pas un spectacle de reprises, même s’il y en aura une ou deux. Parfois, on changera les arrangements, d’autres seront joués de manière plus traditionnelle. Certains artistes seront présents différemment, à travers des allusions parfois inattendues. C’est important en tout cas pour moi de faire un théâtre accessible. Je me dis toujours que ma mère doit pouvoir comprendre !

La Pépinière : Vous insistez sur le fait que ce n’est pas un spectacle de reprises. Vous le voyez plus comme du théâtre avec de la musique, un moment de fête ?

Léa Pohlhammer : Pas forcément une fête, en tout cas pas uniquement. On va chercher la forme précise avec les acteurs. L’idée, c’est de déconner à fond, mais très sérieusement ! Il y aura donc aussi des moments touchants, en se disant qu’on a toutes et tous les mêmes préoccupations très individuelles, mais qu’on les partage pourtant universellement ! Et la musique recouvre bien tout ça : les relations amoureuses, les ruptures… La dramaturgie sera réfléchie autour des sensations provoquées par la musique, que ce soit de la joie ou d’autres émotions. La question maintenant, c’est comment retranscrire et mettre ça en scène ?

La Pépinière : Vous vous décrivez comme une « passeuse de musique », plus que comme une DJ. Comment cela va-t-il se développer sur scène ?

Léa Pohlhammer : On est vraiment dans l’idée d’une playlist : le passage entre les morceaux, donc entre les différentes scènes, se feront par thème ou en totale rupture. On travaille beaucoup avec Andrès Garcia, on a par exemple pensé à un mashup entre les Stranglers et Nuit de folie… et ça fonctionne super bien !

La Pépinière : Dans la conception du spectacle, vous soulignez l’importance du tempo, avec cette durée moyenne de 3 minutes 30 pour les morceaux pop. Vous dites vouloir rythmer le spectacle sur cette base. Comment cela va prendre forme, concrètement ?

Léa Pohlhammer : C’était l’idée de base. Maintenant, le développement du travail sur scène dira si ça fonctionne ou pas… C’est une contrainte de départ, mais elle peut tout à fait évoluer : certaines scènes seront peut-être plus efficaces en une minute, alors que d’autres auront besoin de durer plus longtemps pour trouver leur rythme. On adaptera selon l’effet que ça produira.

La Pépinière : Pour ce projet, vous avez fait appel à des gens de confiance, qui partagent votre passion pour la musique. Vous décrivez d’ailleurs Andrès Garcia comme le partenaire idéal pour Playlist. En quoi incarne-t-il ce partenaire idéal ?

Léa Pohlhammer : Avec Andrès, on se connaît depuis 20 ans, quand il jouait encore de la musique électro en live. Il travaille depuis longtemps avec le milieu du théâtre, donc il connaît très bien les contraintes d’un spectacle de ce type. Ça fait deux semaines qu’on bosse ensemble, plus une période en juin dernier : il travaille vite et bien, en s’adaptant dans tous les styles ; il joue plusieurs instruments, il chante… Dans la musique qu’il compose et dans ses arrangements, le respect du tempo est central ; qu’on chante faux ensuite ou non, peu importe, tant que ce tempo est respecté. Le but du spectacle, c’est aussi de se prendre pour des stars, on va jouer à jouer. Ça doit donc rester un plaisir pour les comédien·ne·s, et ça c’est hyper important pour moi, quel que soit le projet, même quand on doit partir dans une émotion négative, on doit toujours garder ce plaisir du jeu.

La Pépinière : Le projet est encore en cours de construction, mais que pouvez-vous nous dire du décor ?

Léa Pohlhammer : Il sera composé de cinq escaliers. Victor Roy, le scénographe, m’a fait une proposition où les lumières sur les escaliers bougent et peuvent organiser l’espace différemment. Derrière, il y aura un rideau brillant. La scénographie sera donc assez épurée, et la lumière aura ainsi toute sa place pour faire son show, et sera également magnifiée par le jeu. Toutes les stars font ça, et je veux que ce jeu-là soit sous-jacent.

La Pépinière : Et au niveau des costumes, on peut s’attendre à des habits de lumière, façon grandes stars ?

Léa Pohlhammer : On a en tout cas la volonté de mettre de la couleur. Certains costumes seront sans doute plus spectaculaires que d’autres. On n’a pas encore décidé s’il y aurait des changements de costume ou non. Mais ce qu’on veut, c’est que chacun·e d’entre nous représente une facette de la musique pop. Catherine Büchi va représenter la femme-type des années 80, façon Céline Dion ou Bonnie Tyler, avec ce côté un peu femme fatale. David Gobet ira plus sur la facette pop-rock, avec des allures de baroudeur, chanteur-dragueur, un musicien qui se la raconte, un peu à la Axel Bauer ou Francis Lalanne. Pierre Mifsud sera plutôt du côté des opprimés, de la musique qui revendique certaines luttes. Tiphanie Bovay-Klameth sera la fan des grandes stars – elle l’est d’ailleurs dans la vraie vie – et passera de l’ombre à la lumière… Quant à moi, je serai là au début, représentant la facette de la vie en général, comme une icône, une sorte d’âme de la musique qui fait le liant entre toutes les facettes. Sans être la présentatrice, j’introduirai les autres à travers les chansons choisies. C’est vraiment ça qui est central dans la dramaturgie de Playlist.

La Pépinière : Léa, merci beaucoup pour ce moment d’échange. Et vivement décembre pour qu’on puisse chanter et se trémousser sur cette Playlist, avant les fêtes !

Propos recueillis par Fabien Imhof

Infos pratiques :

Playlist, de Léa Pohlhammer et F.A.B Prod., du 5 au 17 décembre 2023 au Théâtre du Loup.

Conception : Léa Pohlhammer, en étroite collaboration avec l’équipe artistique

Collaboration dramaturgique et artistique : Tiphanie Bovay-Klameth

Avec Tiphanie Bovay-Klameth, Catherine Büchi, David Gobet, Pierre Mifsud et Léa Pohlhammer

https://theatreduloup.ch/spectacle/playlist/

Photos : © Anouk Schneider

Fabien Imhof

Titulaire d'un master en lettres, il est l'un des co-fondateurs de La Pépinière. Responsable des partenariats avec les théâtres, il vous fera voyager à travers les pièces et mises en scène des théâtres de la région.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *