Les réverbères : arts vivants

Rencontres, retrouvailles et fêtes à l’Usine à Gaz

Samedi dernier, Karine Grasset, Maï Kolly et Virginie Portier présentaient la première partie de la saison à venir de l’Usine à Gaz, avec différents projets artistiques, scéniques et musicaux, mais aussi une belle proposition de médiation culturelle et des partenariats toujours plus forts. Le moment a été suivi d’une silent party devant le théâtre. 

Sur la scène de la Salle 1, pour changer, Pierre-Alain Couvreu, président de l’association Usine à Gaz, a tout d’abord salué la magnifique programmation de la saison dernière et s’est montré tout aussi enthousiaste en vue de la prochaine, pleine de poésie et de questionnements. Après les remerciements d’usage, il a donc laissé la parole à Karine Grasset, directrice des lieux, Maï Kolly, en charge de la programmation musicale, et Virginie Portier, responsable médiation et développement des publics. En nous invitant à noter la date du 21 novembre pour la présentation de la suite de la saison, elles ont mis l’accent sur la dimension de rencontre que cette nouvelle saison propose, en évoquant également la prise de risque autour de quatre créations, qu’elles n’ont vu qu’à l’état de projet ou sur papier. Avec un changement d’artiste associé-e pour cette saison, Muriel Imbach laissant la place à Kiyan Koshoie, les grandes lignes de la programmation nous ont été dévoilées. Du côté musical, on tente d’allier émergence et notoriété, tout en proposant un suivi des artistes, afin de refléter ce qui se fait actuellement sur notre territoire et ailleurs. Au niveau des arts scéniques, il sera surtout question de rendre intelligibles certains débats sociétaux, sous l’angle de l’empathie et de l’humanité, avec de l’esprit, de la dérision, du corps et de la poésie. En bref, une grande variété de langage scénique. 

Changer de regard 

S’inspirant du titre d’un roman d’Emmanuel Carrère, Karine Grasset nous invite à faire un pas de côté et écouter le récit D’autres vies que la mienne. Dans la même lignée, Maï Kolly invite à ouvrir encore plus largement nos horizons d’écoute. Pour ce faire, on prolongera l’été avec la seule date suisse de Giorgio Poi, artiste italien aux influences à la fois mélancoliques et lumineuses. À noter le Tessinois Tam Bor en première partie, et surtout la possibilité d’effectuer un tour en pédalo gratuit, en présentant son billet de concert au Ponton ! Toujours dans le cadre de La Bâtie, Jeanne Spaeter nous emmène au Château de Nyon, avec Amour sous contrat : entre expérience et mise en jeu, elle a imaginé, avec l’aide d’une avocate, un contrat en quatorze clauses, résumant toutes les étapes d’une relation amoureuse, qu’elle a ensuite partagé avec un homme ayant répondu à l’appel de candidature. C’est la documentation de ce projet qu’elle nous montre sur scène, alors que le public pourra choisir quelles parties il a le plus envie de découvrir. Enfin, Young folks, le tube de Peter Bjorn & John, résonnera lors du concert du groupe, le 12 septembre, avec sa pop inventive et sophistiquée. Il sera précédé du duo Wolfberg, avec des sons indie pop noise qui bousculeront nos habitudes d’écoutes. 

La saison se poursuivra le 14 septembre, en collaboration avec le Château de Prangins. Dans Trophée, Rudi Van Der Merwe et Béatrice Graf explorent, à l’aide de trois étranges figures féminines, la progression inexorable de l’invasion, pour interroger l’assujettissement des femmes, de la nature et de l’autre en général. Ce spectacle à la grande puissance évocatrice fait écho aux forces impérialistes à nouveau à l’œuvre en ces temps troublés. Quatre jours plus tard, Mickaël Délis questionnera, avec humour, les normes sociales du genre masculin, en cherchant sa manière d’être homme. Construit comme la réflexion de Simone de Beauvoir, et portant d’ailleurs le même titre, Le premier sexe, sous-titré ou la grosse arnaque de la virilité présentera une galerie de personnages qui fera réfléchir à la notion de virilité et de masculinité.  

Le mois de septembre se conclura avec deux concerts : UTO enflammera la scène, dans un véritable voyage sensoriel, au carrefour « entre le mainstream et le chelou », précédé d’une première partie pas encore connue. Le lendemain, en soutien à l’association Suspend’us, qui tend à offrir différentes prestations à des personnes en situation de précarité, une triple soirée, composée mélangeant humour, musique et DJ set, sera présentée par Chelan, Félix Ringaby et Club Katel, le 27 septembre. 

Jeune public, famille et ouverture à tous/tes 

Octobre débutera avec La fabuleuse histoire de Basarkus, comme premier spectacle jeune public de la saison. Ou l’histoire d’une émancipation, pour aboutir à l’autonomie et à plus de liberté. Comme pour chaque représentation jeune public, le spectacle sera suivi d’une discussion avec les enfants, et d’un goûter offert ! Le week-end, place à l’univers hybride de Baby Volcano, entre musique et arts plastiques, précédée de Lum, entre rap, chant, jazz, R’n’B et pop. Et pour plus de calme, le dimanche 5 octobre aura lieu le premier concert assis de la saison, celui de Mel D, entre douceur et émotions, avec sa soul indie pop qui devrait nous charger de bonnes énergies avant l’automne. 

Pendant les vacances scolaires, « c’est tellement idiot que c’est drôle » : Bankal, un spectacle à voir en famille, où deux acrobates cherchent leur équilibre face à la chute. Le vendredi 24 octobre, le trio hybride Bada-Bada, à mi-chemin entre jazz, électro, hip-hop et impro, suivra Mantocliff, en première partie, qui proposera un jazz rock empreint d’une grande diversité sonore. Le 29 octobre, la Cie Chamar Bell Clochette présentera aux enfants Robot, un spectacle sans parole, où un drôle de duo cherchera à remettre en marche M. Robot, à l’aide d’ingénieux mécanismes. Le mois d’octobre se terminera avec une grande soirée d’horreur, où Improviza Nyon improvisera sur le thème d’Halloween, à grand renfort de mythes macabres et d’invités effrayants… 

Bongo Joe et bien d’autres 

Cette année, le label Bongo Joe fête ses 10 ans. Pour l’occasion, l’Usine à Gaz en fait son label associé et propose différents événements, à commencer par la fête des 10 ans, le 7 novembre. Au programme, un spectacle, de la musique, et un DJ set, pour montrer les différentes activités soutenues par le label, en plus de ses sessions. Le lendemain, toujours en musique, Déportivo viendra présenter son grunge rockboot à l’énergie viscérale, avec Équipe de Foot en première partie : s’ils n’y connaissent rien à ce sport, ils font tout de même trembler les stades avec le rock lofi nerveux. 

La seule création de cette première partie de saison se jouera les 13 et 14 novembre. Dans Jacqueline, Rébecca Balestra incarnera Jacqueline Maillan, qui obtient enfin le grand rôle qu’elle attendait. Mais voilà que le cocktail de barbituriques qu’elle a ingéré, désespérée de ne pas obtenir ce rôle, fait déjà effet. Dans cette comédie de boulevard tragi-comique, écrite par Guillaume Poix et mise en scène par Manon Krüttli, on ne risque pas de s’ennuyer… à mourir ! Le week-end se conclura avec la seule date suisse de Colt, avec une première partie par encore dévoilée, pour soirée pop sensible et tonique. 

Ensuite de quoi, un temps fort syrien est prévu. On commence les 20 et 21 novembre, avec Shahada, de Fida Mohassen, qui narre son histoire et son double rapport au théâtre et à la religion, face au dogme, pour un itinéraire intime de l’enfermement à l’émancipation. Durant tout le week-end, on pourra prolonger le voyage, avec des rencontres, de la musique, de la poésie et de la cuisine syrienne à découvrir et déguster. 

Enfin, Les 27 et 28 novembre, une soirée composée vous est proposée. On retrouvera d’abord David Zagari et Le Piquet, entre danse, arts visuels, pole dance et plasticité. Il sera suivi par Eddy, la performance d’un personnage étrange, décalé, marginal, qui ne s’exprime qu’à travers sa batterie. Le week-end s’achèvera avec Frànçois & The Atlas Mountains, pour une pop soyeuse et raffinée, et un voyage intime dans l’élégance et l’humanité. 

S’exprimer en décembre 

Le mois de décembre sera celui de l’incitation à l’expression. On début avec 4211 km, soit la distance séparant Téhéran de Paris, où Aïla Navidi raconte son parcours d’enfant de l’exil. À cheval entre les deux cultures, il propose un spectacle plein de vie, de joie, de disputes et d’amour. Le 6 décembre, place au festival Nyon’s on fire, entre metal, stoner, rockabilly et autres divers styles de rock. Ça va bouger ! Enfin, on conclura 2025 les 13 et 14 décembre avec Castelet is not dead, un spectacle de marionnettes familial, où les évolutions autour de la technologie sont interrogées avec humour autour de trois courtes histoires. 

En marge de tout cela, l’Usine à Gaz fera aussi partie du parcours culturel de La Marmite, proposera un concours de dessins aux enfants, en marge des spectacles jeunes public, collabore avec plusieurs hautes écoles et écoles professionnels pour obtenir le regard d’étudiant-es sur les soirées proposées, et jouera même un spectacle en prison, en favorisant un moment de discussion avec les détenues. 

En plus des nombreuses tables rondes, discussions bords plateaux et autres introductions, l’artiste associé Kiyan Koshoie proposera aussi des ateliers autour de la thématique « Comment raconter avec le corps ? ». Sans oublier la participation du théâtre au projet ACT – Art en Coopérative Transfrontalière, mais aussi des collaborations artistiques avec différents lieux et festivals de la région. Enfin, notons une nouveauté concernant les abonnements. Avec l’Abô, imaginé par Côté à Côte, les 18-30 ans ont l’occasion, pour la modique somme de 100 francs, d’assister à toutes les propositions organisées non seulement par l’Usine à Gaz, mais aussi par le Casino Théâtre de Rolle et le Théâtre de Grand-Champ à Gland. Soit plus de 100 propositions sur la saison, et donc des spectacles à moins d’un franc si l’on parvient à aller tout voir ! Peut-on trouver mieux en termes de bon plan ? 

Si ce début de saison s’annonce déjà très prometteur, on se réjouit de découvrir la suite le 21 novembre prochain ! 

Fabien Imhof 

La programmation complète et les détails de chaque spectacle et événement sont à retrouver sur le site de l’Usine à Gaz. 

Photos : ©Anne Chemla 

Fabien Imhof

Co-fondateur de la Pépinière, il s’occupe principalement du pôle Réverbères. Spectateur et lecteur passionné, il vous fera voyager à travers les spectacles et mises en scène des théâtres de la région, et vous fera découvrir différentes œuvres cinématographiques et autres pépites littéraires.

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