Le banc : cinéma

The Suicide Squad – le retour des salopards de DC

Les pieds nickelés du Suicide Squad sont envoyés sur l’île de Corto Maltese afin de contrecarrer une junte militaire détenant un pouvoir extra-terrestre. James Gunn, réalisateur des Gardiens de la Galaxie, signe un second volet avec plus de bonheur que son prédécesseur.

La popularisation des films de super-héros de ces dix dernières années s’est accompagnée du sous-genre des anti-héros qui, bien que moins nombreux, semblent devenir de plus en plus présents sur nos écrans. Plusieurs franchises ont ainsi vu le jour. Dead Pool de Marvel, les séries The Boys et The Invicible figurent parmi les exemples les plus récents et les plus probants de cette veine héroïque. Car quoique l’on dise, les protagonistes sont bel et bien du “bon” côté et permettent ainsi d’offrir une perspective moins manichéenne que celle présentée par les héros classiques. Leurs défauts les dépouillent de leur statut de héros, les rendant ainsi plus humains et permettant de créer des situations humoristiques.

La franchise Suicide Squad figure bel et bien dans cette catégorie. Comme le titre l’évoque. Nous suivons une équipe de super-criminels constituée de méta-humains, de sociopathes, d’assassins et autres inadaptés plus décalés les uns que les autres. Sommés de rejoindre une unité spéciale en échange d’une réduction de peine, ils sont chargés de remplir des missions jugées impossible. En d’autres mots, une sorte d’Agence tous risques des super-héros. Faisant face à des ennemis autrement plus dangereux qu’ils ne le sont, ils représentent l’idée que “la fin justifie les moyens”.

Premier élément remarquable, hormis Harley Quinn toujours interprétée par Margot Robbie, nous ne retrouvons aucun des membres du premier squad. Et pour cause, The Suicide Squad n’est pas la suite directe du premier volet réalisé par David Ayer mais se situe plutôt dans le même univers. Malgré une apparition de Boomerang, cambrioleur utilisant (surprise) un boomerang comme arme de prédilection, l’équipe est quasiment entièrement constituée de nouvelles recrues. Disons-le tout de suite, cette équipe n’est foncièrement nouvelle que dans le nom de ses membres. Leurs compétences ainsi que leur valeur narrative restent les mêmes. On pourrait presque s’amuser à tracer les parallèles entre les deux films.

Ainsi, le personnage de Bloodsport campé par Idris Elba rappelle Deadshot interprété par Will Smith dans le premier opus. Mêmes compétences de tireur hors-pair, même rôle au sein de l’équipe, mêmes problèmes avec sa fille, l’on en vient à se demander si le rôle n’a pas été simplement prévu originellement pour Will Smith. Toutefois, on peut se réjouir de ce changement tant le décalage entre les deux jeux d’acteur est évident. Elba apparaît alors plus crédible dans le rôle du mercenaire froid et efficace. Les (grosses) carences scénaristiques finissent par le rattraper et nous rappeler de ne pas trop avoir d’attente quant à la qualité finale.

Les autres membres de l’unité peuvent aussi être mis en parallèle avec ceux du précédent opus. Le caustique Boomerang, qui remplissait le rôle du comique de service dans le premier opus est relevé par Peacemaker campé par un John Cena qui semble plus jouer son propre rôle. Le méta-humain King Shark joué par Sylvester Stalonne rappelle Killer Croc. Enfin, Polka-Dot Man interprété par David Dastmalchian nous renvoie à Diablo dans leur rejet d’un pouvoir extraordinaire dû à un traumatisme familial antérieur. Il est cependant important ici de souligner que chacun des acteurs offre une performance nettement au-dessus de leur contrepartie du premier volet. Seule exception, le personnage de Ratcatcher 2, joué par Daniela Melchior, représente une garante de la moralité du groupe, absente du premier film. On retrouve aussi Joel Kinnaman dans le rôle de Rick Flag et Viola Davis (probablement la meilleure actrice du film) dans celui de la machiavélique cheffe de l’unité.

À dire vrai, tout semble meilleur, comme si la production avait décidé d’injecter plus d’argent dans ce projet. Pourtant, il semble que les deux films aient eu accès plus ou moins au même budget[1]. La réponse se trouve dans le travail de James Gunn. On y retrouve le même ton irrévérencieux que dans les Gardiens de la Galaxie. Au niveau cinématographique, Gunn semble même s’amuser à moquer son audience, et même de manière plus franche que dans ses collaborations avec un univers Marvel tendant souvent vers l’aseptisé. Ici, sang et parties intimes sont de la partie et ce, sans le moindre complexe.

Toutefois, le film peine à convaincre dans l’ensemble. Le problème réside dans un scénario trop bancal. Sans le support de ce scénario, on assiste à des transitions peu subtiles et parfois soudaines entre scènes comiques et tragiques. Sans ce travail narratif nécessaire en amont, Suicide Squad 2 devient simplement une série de gags sans véritable substance. L’histoire se résume alors à l’idée un peu trop simple que les vilains ne sont pas si vilains et que les gentils ne le sont pas. Pourtant aussi signé par James Gunn, on peut se demander où est passé l’inspiration des Gardiens de la Galaxie. Les changements de castings pourraient expliquer dans une certaine mesure ces points faibles (Will Smith était originellement destiné à reprendre le rôle de Deadshot).

En définitive, Suicide Squad 2 est un projet plus ambitieux que son prédécesseur et cela se sent. Tout y est mieux, qu’il s’agisse du jeu d’acteurs, de la réalisation et de l’histoire, malgré ses nombreux défauts. Le film réussit alors à rentrer dans la catégorie des suites meilleures que le premier. Ainsi, si l’on ne peut pas le mettre au même niveau que d’autres films d’antihéros cités plus haut, on passe cependant un agréable moment ponctué de gags qui fonctionnent malgré tout. À voir pour les fans de films de superhéros et pour toutes celles et ceux qui veulent passer un bon moment de divertissement sans prise de tête.

Alexandre Tonetti

Référence : The Suicide Squad de James Gunn avec Idris Elba, Margot Robbie, Viola Davis et John Cena, États-Unis, 2021 (sortie en salles le 28 juillet 2021).

Photo : ©DR

[1]https://www.forbes.com/sites/scottmendelson/2021/03/26/suicide-squad-trailer-margot-robbie-idris-elba-james-gunn-dc-films-will-smith-joker/?sh=1325c40078a3

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *