Une escroquerie À l’ancienne
Dans le dernier long-métrage d’Hervé Mimran, deux vieux compères tentent de faire la nique au loto, en organisant une énorme arnaque. À l’ancienne est une comédie familiale pour laquelle il ne faut pas trop se prendre la tête, mais qui s’avère plutôt efficace.
Sur une petite île isolée en Bretagne, Jean-Jean (Didier Bourdon) et Henri (Gérard Darmon) sont deux vieux amis qui coulent une retraite paisible, passant une grosse partie de leur temps à pêcher ensemble. Mais Henri rêve de partir vivre en Sicile avec son épouse Nadège (Chantal Lauby). Alors, quand Jean-Jean apprend qu’un habitant de l’île a décroché le gros lot au loto, les deux compères vont tout faire pour savoir qui c’est et récupérer le pactole. Mieux encore : le lauréat est décédé entre temps, sans héritier connu. Une aubaine pour nos deux retraités. Seulement voilà, les circonstances vont les contraindre à mettre tout le village dans la confidence, à commencer par Erwan (Yoann Eloundou), le petit-fils de Jean-Jean, dont les compétences en informatique risquent d’être bien utiles. L’opposition du vieux grincheux Isidore (François Chattot) et l’enquête obligatoire de l’huissière Mlle Camoin (Noémie Chicheportiche) pourraient bien leur mettre des bâtons dans les roues. Qu’à cela ne tienne, ils sont bien décidés à régler tout cela À l’ancienne.
Une pure comédie à la française
Qu’on se le dise tout de suite, À l’ancienne ne vaut pas les précédents succès d’Hervé Mimran, qu’il s’agisse de Comme t’y es belle ou Tout ce qui brille. On se surprend toutefois à beaucoup rire et passer un moment plutôt agréable. Ce qui, au final, est tout ce qu’on demande à ce genre de film. On peut le situer dans la plus pure tradition des comédies françaises, avec tous les codes que cela implique. Parlons d’abord du casting : la rencontre entre Les Nuls de Darmon et Lauby et Les Inconnus de Bourdon fonctionne plutôt très bien. On soulignera ici la complicité du duo leader-boulet, à l’instar de Gérard Lanvin et Benoît Poelvoorde dans Le Boulet, ou encore Jean Reno et Gérard Depardieu dans Tais-toi. On y retrouve le boulet loyal et le leader qui menace de trahir son complice lorsqu’il n’aura plus besoin de lui. La situation est d’ailleurs compliquée par le fait que Jean-Jean doit jouer le rôle central dans l’escroquerie, volant un peu la vedette à celui qui pense être le cerveau de l’opération…
On évoquera encore le décalage entre ces personnages âgés, isolés sur leur île, et leur confrontation à la dure réalité des cités, lorsqu’ils doivent se rendre sur le continent pour mener à bien l’une des étapes de leur arnaque. Parlons aussi de cette antagoniste un peu décalée, si on peut l’appeler ainsi. Disons plutôt celle qui peut tout faire capoter, car obligée de mettre son nez dans les affaires des deux compères. Avec son humour parfois borderline et sa grande capacité à fouiner pour flairer l’escroquerie, elle mettra à mal le transit de Jean-Jean… N’en disons pas plus, le mieux est encore de vous faire votre propre idée de la situation.
Le gag de trop ?
Comme souvent dans ce genre de comédie, les effets comiques s’enchaînent, qui à aller dans la surenchère. Pour autant, la plupart du temps, ceux-ci fonctionnent bien, avec quelques jolies surprises, parfois totalement improbables. On apprécie le côté loufoque de ce moment où Jean-Jean doit traverser l’île tout nu sur sa mobylette, ou encore l’humour gras – on rappelle l’évocation précédente du transit intestinal – pour gagner du temps face à Mlle Camoin. Il y aussi cet accent écossais pas si bien imité par Jean-Jean, mais qui donne le change lorsqu’il le faut, ou encore cette affaire qui leur montre à la tête, quitte à se prendre pour des bandits de grand chemin… À l’ancienne regorge ainsi d’effets comiques, quitte à ce que certaines scènes tombent parfois dans la facilité, mais c’est aussi ce qu’on attend d’une comédie comme celle-ci. À ne surtout pas prendre au sérieux !
La surenchère de gags a toutefois ses limites, et on peut se poser la question de la scène finale, qui tombe peut-être dans un certain excès. Sans tout dévoiler ici, on vous dira simplement qu’elle implique, entre autres, un hélicoptère, une allergie, une cabine téléphonique en bord de falaise, et un vieux ronchon grabataire. À vous d’imaginer le tableau ensuite. À l’ancienne tourne ainsi presque à une forme de parodie sur la fin, et toute finesse – si tant est qu’il y en ait eu auparavant – finit alors par disparaître. Mais que demander d’autre ? On reste dans l’esprit de ce à quoi on s’attendait, pour cette comédie à voir en famille ou entre amis, avec du pop-corn et, pourquoi pas, quelques bières pour l’accompagner.
Fabien Imhof
Référence :
À l’ancienne, réalisé par Hervé Mimran, France, sortie en salles le 4 septembre 2024.
Avec Didier Bourdon, Gérard Darmon, Chantal Lauby, Paloma Coquant, Laurent Capelluto, Yoann Eloundou, Noémie Chicheportiche, Martine Schambacher, François Chattot…
Photos : ©Julien Panié – ZAZI FILMS – FIVE DOGS