Les réverbères : arts vivants

Derrière le rideau #6 : Théâtre Saint-Gervais

Alors que Genève est à nouveau semi-confinée, les lieux de culture doivent prendre leur mal en patience. Fermés, ne pouvant plus accueillir spectacle et public, les voilà à nouveau dans une situation difficile.

Face à ce contexte, La Pépinière a décidé de donner la parole à celles et ceux qui font habituellement vivre la vie culturelle de la Cité, au travers de trois questions types. L’idée ? Leur permettre de s’exprimer sur la façon dont ils et elles vivent cette période, connaître leurs projets et imaginer avec eux le monde (culturel) d’après.

Dans ce sixième volet de Derrière le rideau, c’est le Théâtre Saint-Gervais qui s’exprime, par le biais de sa directrice, Sandrine Kuster.

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Le Conseil d’État a annoncé la fermeture, entre autres, des lieux culturels tels que le vôtre, comment réagissez-vous à cette situation, comment le Théâtre Saint-Gervais vit-il cela ?

Nous acceptons cette fermeture car nous n’avons pas le choix. Nous déplorons cependant une certaine injustice par rapport à d’autres secteurs (toujours ouverts) qui véhiculent plus le virus à l’inverse des théâtres et des cinémas qui n’ont observé aucun cas de contamination. L’ouverture possible avec une jauge à 50 places était assez viable pour nous et pour beaucoup de petites structures à Genève. Cela permettait de faire vivre les créations en cours et de maintenir une offre au public. La fermeture totale et les reports que cela implique vont créer un effet d’embouteillage dans les programmations.

Le milieu culturel est peu consulté lors des prises de décisions alors que ce secteur pèse lourd dans l’économie.

On a vu, pendant la première vague, des théâtres proposer diverses choses, comme des diffusions de captations de pièce, ou des lives, envisagez-vous de mettre quelque chose en place pour cette période de transition avant la reprise qu’on espère la plus rapide possible ?

Le numérique permet de garder une trace d’un spectacle, de montrer un spectacle à des professionnels qui n’ont pas réussi à venir voir un spectacle, etc.

Une proposition numérique d’art de la scène doit être pensée et élaborée pour l’écran, sinon cela enlève la caractéristique essentielle du théâtre qui être d’être en présence de l’œuvre. Nous ne sommes pas encore en capacité (moyens, connaissances) de proposer du contenu numérique valable dans le domaine des arts de la scène. En outre, le numérique, quand il sera bien élaboré pourrait permettre d’atteindre des nouveaux publics. Il faut peut-être profiter de cette période pour s’améliorer dans ce domaine…

Nous ne prévoyons donc rien (pour l’instant) dans ce sens au public mais des mesures sont prises par les artistes, qui sont actuellement en travail, pour des « lives » en streaming, des captations à l’attention des professionnels ou pour garder une trace en prévision des reprises ultérieures.

Comment imaginez-vous le monde d’après, au niveau de la culture surtout ?

Cette crise révèle les bonnes comme les mauvaises choses qui n’étaient pas visibles ou dont on ne parlait pas dans le domaine des arts de la scène. Cette crise révèle l’importance de la culture dans notre société, que la culture est un secteur économique aussi, elle révèle le statut précaire des artistes et la relation au chômage. On n’a jamais autant parlé de culture et de son financement que durant cette crise. Malheureusement, je crains que cette crise ne fasse ressortir encore plus les inégalités de ressources dans ce domaine (chez les artistes et au niveau des structures). Je crains aussi que cette crise fasse disparaître une culture moins dotée financièrement mais plus forte artistiquement.

Profitons de ces fermetures et tout ce que cela implique pour re-questionner notre rapport à la production de spectacles, notre rapport au public, donner plus de moyens aux artistes, à la recherche artistique…

Je suis une personne positive qui croit que les choses n’arrivent pas par hasard et je suis sûre, si nous nous mettons au travail dans ce sens, que nous sortirons enrichis de cette crise.

Merci à Sandrine Kuster, pour le Théâtre Saint-Gervais, d’avoir répondu à nos questions !

Propos recueillis par l’équipe de La Pépinière

Photo : © Théâtre Saint-Gervais

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