Les réverbères : arts vivants

La jeune fille et le Rossignol

Un concert de musique espagnole, une jolie et intéressante production lyrique donnée au village de Prangin : c’était à voir les 5 et 6 février 2022.

Dans la grande salle des Morettes à Prangins, sur scène à jardin, un piano à queue laqué de noir. À cour, une chaise, un drapé de couleur la recouvre. Un vaste espace de jeu entre les deux. Tout laisse à penser qu’un concert lyrique classique se présente. Seulement, au fur et à mesure que le spectacle se donne, force est de constater qu’il n’en est rien. La grande idée développée ici est de trouver le juste équilibre entre un récital lyrique plutôt bourgeois et une dimension plus vernaculaire, une ambiance de place de village, de taberna avec verres de vin, robes à volant et castagnettes. Ainsi on découvre les compositions de Manuel de Falla, Federico de Garcia Lorca ou de Joaquin Rodrigo entre la statuaire d’une représentation lyrique et les virevoltes des nuits bleues d’Espagne.

Car tout est là. Robes à volants justement, talons qui frappent le sol, claque des mains en rythme et les couleurs chaudes des jours et des nuits espagnoles. Tout est là car tout doit y être et se justifie dans cette proposition de fusion audcieuse de la musique espagnole et du flamenco faite par les quatre artistes : Antonia Sandoval, Grégory Deboulle, Antonio Perujo, Silvia Perujo. En effet, ils le déclarent : « Unir le chant lyrique au rythme et à la danse flamenco, démontre que le “baile flamenco” s’adapte à toute musique qui en exprime le sentiment. »

Ce spectacle embrasse « les différentes époques de la musique et de la tradition espagnole, de la chanson judéo-espagnole adaptée par Rodrigo, aux chansons populaires arrangées par Lorca, la chanson contemporaine espagnole, l’opéra et la zarzuela et enfin le chant dansé, “el Amor brujo”, de Manuel de Falla. »

Avant le lever de rideau, un chant de femme remplit l’imaginaire de chacun. Pour ceux issus de cultures espagnoles, il doit en être différent naturellement. Quoi qu’il en soit, on peut évoquer la douceur d’une balade au soir d’été, la complainte d’une amoureuse ou le chant d’une porteuse d’eau. Ce fut une entrée en matière délicate. Puis, Antonia Sandoval poursuit le récital avec en arrière-plan, dans un cercle de lumière, une ombre que l’on dit chinoise et qui montre la silhouette d’une danseuse espagnole qui accompagnant en gestes aériens les chants. Le tout est plein d’élégance.

La danseuse Silvia Perujo vient sur scène pour les chants suivants dont le joli titre : La jeune fille et le Rossignol du compositeur Enrique Granados. Mouvements de danses hispaniques, jeu de robe qui sortant de son jeu classique vient offrir un effet de scène en détournant les volants et en les présentant tel un couffin. Belle et élégante idée.

Puis, après avoir placé le public dans l’ambiance d’une taberna où le vin sait séduire autant que les chants, les tableaux se suivent, accompagnés en plus d’Antonio Perujo, une silhouette puissante qui propose une chorégraphie toute en légèreté.

Ce spectacle accompagné par Grégory Deboulle au piano est une suite de beaux moments, et quand dans quelques tableaux, les seules percussions corporelles s’imposent, on reçoit cette part d’Espagne qui sait si bien séduire.

Lyriques et populaires, de belles raisons de découvrir ce concert de musiques espagnoles.

Jacques Sallin

Infos pratiques : Concert de Musique espagnole à la salle des Moirettes à Prangins, les 5 et 6 février 2022

Conception : Antonia Sandoval

Avec Antonia Sandoval, Grégory Deboulle, Antonio Perujo, Silvia Perujo

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