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L’écriture qui pousse #10 : Die Falle

Bienvenue dans L’écriture qui pousse ! Aujourd’hui, vous allez découvrir un des textes produits dans le cadre de nos défis littéraires. Le défi du mois de juin 2021 portait le titre suivant : proie & prédateur. L’idée ? Créer un texte qui permette d’incarner tour à tour les deux points de vue…

Aujourd’hui, Laure-Elie Hoegen vous propose sa vision de la prédation… Bonne lecture !

* * *

Die Falle

Il aurait fallu que nous ne perdissions pas Aziz, que nous ne…, que nous ne loupassions pas le pont qui nous séparait de l’autre rive et que les militaires, soutenus par un État en fébrile gestation, n’explosassent pas les inratables et fantastiques traces de dinosaures pour que j’accouche d’un grand oui à l’inéluctable question : est-ce que votre voyage était bien ?

Cette interrogation m’agite. Elle s’empare de mon sommeil de touriste, tandis que, hérissée sur mon exped[1], je guette les étoiles filantes. Ici, à Langar, une équation me plaisait : zéro confort  – zéro pollution lumineuse – héroïnes de la nuit, bienvenue… bien. C’était bien, bien comment ? Premier cri de loup, là-haut, on me dit que c’est loin, très loin. Bien, enfin bien, si loin.

Il y a un deuxième exped à mes côtés, et tu y es absorbé par la pesanteur de l’obscurité. De paisibles ronflements résonnent contre le tissu alvéolé – tu es si mignon, alors que, dans ma torpeur, je souhaiterais qu’un imam crie la fin de la nuit. Puis, tu ouvres grand les yeux, puisque je te secoue. Tu as entendu ? Tu as entendu ? Qu’on se tire de là, car l’aventure n’est pas là, mon petit moineau. Je me hisse hors du sol. Tu dors.

Il n’aurait pas fallu que les trois branquignoles, ancrés autour du feu, ne se souillassent de vodka. Puisqu’on les réveilla.

                                                                       Le premier et le deuxième,

Qu’on s’habilla.

                                                                       Le troisième

Ne cilla pas.

On vit de loin, des lampes torches parmi les pins. Elles gravirent la forêt, débusquèrent les créatures nyctalopes. Trois faisceaux flanchaient à l’arrière. Un quatrième s’immobilisait. Le premier pistait le loup. Oui, le voyage était très bien.

Laure-Elie Hoegen

Photo : ©Laure-Elie Hoegen

[1] L’exped est le matelas de tente exposé sur la photo.

Laure-Elie Hoegen

Nourrir l’imaginaire comme s’il était toujours avide de détours, de retournements, de connaissances. Voici ce qui nourrit Laure-Elie parallèlement à son parcours partagé entre germanistique, dramaturgie et pédagogie. Vite, croisons-nous et causons!

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