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Mondes Imaginaires : Physique atypique (2)

L’association Mondes Imaginaires, fondée en 2019, regroupe trois anciennes étudiantes en Lettres qui, au terme de leurs études, sont arrivées à une constatation : bien souvent (trop souvent), les littératures de l’imaginaire sont décriées et dévalorisées. Pourtant, l’histoire se construit sur un imaginaire, une conscience collective, et une transmission des mythes dits fondateurs. 

Mondes Imaginaires proposent donc des ateliers participatifs et créatifs aux enfants comme aux adultes, afin que les univers fictifs viennent nourrir le quotidien. User du pas de côté qu’offrent des moments de créativité permet d’enrichir la réflexion à travers des points de vue différents et des concepts innovants. Tous les mois, Mondes Imaginaires proposent un atelier d’écriture créative sur un thème différent. Ensemble, nous explorons diverses facettes de l’écriture et de l’imaginaire. Le but est avant tout d’oser écrire, dans un climat de bienveillance, tout en acquérant de la confiance en soi. Chaque thématique est présentée grâce à des ouvrages qui servent de référence (en science-fiction, fantasy ou fantastique), parfois avec un ancrage historique – ce qui permet de stimuler l’imaginaire. Les participants peuvent, s’ils le souhaitent, intégrer des éléments proposés par les animatrices dans leurs écrits. L’atelier se clôt par un partage volontaire des créations. Un seul mot d’ordre : imaginer !

Les textes que vous découvrirez au sein de cette rubrique sont tous issus de ces ateliers. Aujourd’hui, David Weber vous parle… d’écureuil. Bonne lecture !

* * *

La couleur de l’âme (2e partie)

Les premières émotions de la belle au réveil furent l’incompréhension, la souffrance, puis la colère.

Elle se leva péniblement, s’approcha en boitant de la porte et appuya sur la poignée tout doucement. Quand elle arriva au bout de son mouvement, la porte ne s’ouvrit pas. Elle hurla et se jeta de toutes ses forces sur cette porte qui l’empêchait de sortir. Elle appelait De La Croix, hurlait son nom.

Lui, était assis non loin de là, sur les marches de l’escalier en face de la chambre de bonne. Il regardait la porte se gondoler sous l’effet des coups. D’un côté, il était excité par l’effet qu’il lui faisait, cette colère, cette rage ; d’un autre, une terrible honte le rongeait. Cependant, un côté froid et calculateur s’immisçait lentement en lui. Que faire maintenant ? Les enfants rentreraient le lendemain soir. Il leur faudrait une explication. Il ne pouvait donc pas la laisser enfermée, il ne pouvait pas la renvoyer chez elle non plus. Bien qu’elle ne soit qu’une simple gouvernante, cela pourrait quand même entacher sa réputation.

*

Finalement, il sut ce qu’il devait faire, mais il n’allait pas agir tout de suite, il allait la laisser s’épuiser. Il avait le temps.

*

Une fois sa décision prise, il alla vers la porte :

« Néphi ? »

Les bruits s’arrêtèrent.

« Tu as aimé cette nuit passée avec moi ? »

Elle hurla et redoubla de force contre la porte.

« Je savais que tu aimerais, ma petite. Je vais te laisser te reposer un peu avant que l’on recommence. »

Un grand bruit retentit contre la porte et des sanglots éclatèrent.

Il partit, un sourire carnassier aux lèvres.

*

Il revint ainsi plusieurs fois dans la journée, réanimer sa colère.

Il vint aussi pendant la nuit, lui décrivant ce qu’il faisait à travers la porte, comment il se donnait du plaisir, et ce qu’il lui ferait la prochaine fois. Mais il n’y avait plus de réaction. Il essaya encore pendant la matinée, mais plus aucun bruit ne provenait de derrière la porte. Il était déçu, l’indifférence était ce qui le chagrinait le plus. Il se demanda si elle était partie. Mais ce n’était pas possible : elle était au quatrième étage, sous les combles, comment aurait-elle pu s’enfuir ? Il vérifia quand même en allant voir dehors, mais les volets de la chambre de bonne étaient fermés. Il se dit alors qu’elle était résignée, peut-être même avait-elle quand même aimé ça…

*

La matinée prenait gentiment fin, il se devait d’agir avant le retour des enfants. Il prit le plus grand couteau de la cuisine, l’affûta encore un peu pour être sûr.

*

Il arriva devant la porte, tourna la clé dans la serrure, guetta une réaction, un bruit. Rien.

Il ouvrit doucement la porte, l’excitation se mélangeant à la peur.

Il faisait sombre, la lumière du couloir permettait juste d’apercevoir le petit lit tout au fond, une silhouette se dessinait dessus, il espéra pendant un instant qu’elle se soit donné la mort, se serait tellement plus facile. Il s’approcha à pas de loup, le couteau dans sa main droite derrière lui, caché pour qu’elle ne l’aperçoive pas si elle se retournait.

Une masse le percuta par-derrière,  il voulut ramener sa main droite en avant pour amortir sa chute, mais elle resta bloquée, maintenue collée dans son dos. Il se rattrapa avec seulement sa main gauche, mais cela ne suffit pas, le poignet plia selon un angle pas naturel, il hoqueta de douleur, alors que son front heurtait brutalement le sol. Le couteau lui échappa des doigts.

La masse était sur son dos, le chevauchait et l’immobilisait, sa propre lame, glaciale, se posa sur sa carotide. Une main lui agrippa les cheveux et lui fit tourner la tête.

« Tu voulais voir mes yeux, hein connard, alors regarde-les biens ! »

*

Il la regarda avec un air éberlué. Le couteau trancha, le sang gicla et au milieu de ses profusions vermeilles, deux yeux verts le fixaient avec haine et satisfaction.

Jessica Vonlanthen

Photo : ©Free-Photos

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