Spartivento, là où les bonheurs convergent

Aujourd’hui, La Pépinière vous emmène au sein de l’atelier de critiques qu’elle organise pendant le festival Visions du Réel. Les participant-e-s ont visionné un film et se sont livrés à un exercice de critique courte. Voici la première d’entre elles, signée Annik Morier-Genoud.

Le chant assourdissant des cigales, le bruit des voitures qui passent, le ressac de la mer… Le vert éclatant d’une feuille qui ondule, des fourmis qui s’activent et la beauté en suspens d’un grillon mort…

La bande-son du dernier court-métrage de Marco Piccarreda et ses plans-séquences lents captent avec délectation l’étuve estivale de Spartivento, petite bourgade calabraise oubliée en bord de mer.

En dévoilant le quotidien d’une grand-mère arrivée au crépuscule de sa vie et celui de son petit-fils, Ariele, Marco Piccarreda nous montre de manière poétique leurs réalités qui se conjuguent au singulier tout en fusionnant à deux : les protagonistes se parlent sans pouvoir toujours se comprendre ; ils se toisent avec tendresse, se distendent tout en se rassemblant et forment, toujours, avec pragmatisme et humour, un duo inséparable. Chacun tend la main à l’autre quand celui-ci en a besoin.

Les filmant avec pudeur mais de façon insistante, le réalisateur a réussi le pari de créer une œuvre captivante. La caméra saisit sans jamais bousculer un dialogue perpétuel entre ombres et lumières. Des couleurs qui effacent ou éblouissent s’emparent au gré des scènes d’autant d’élans de vie que de recueillements intimes.

Adoptant tantôt le point de vue de Rosetta, tantôt celui d’Ariele, le film oscille entre les matérialités de l’aïeule arrivant au bout de son chemin terrestre et l’univers onirique du petit-fils, beau garçon aux apparences trompeuses. Et lorsque ces réalités se frôlent et s’entremêlent, le bonheur, simple et puissant, est au rendez-vous.

Annik Morier-Genoud

Référence : Spartivento, Marco Piccarreda, Italie, 2022, 38 min.

Photo : © DR