Terre et mer soudainement reliés
Comme il est bon de passer entre les gouttes… Ode à la pluie, au gris et à tous les élans naissants lorsque la pluie s’abat sur nos fronts. Le nouveau seule-en-scène d’Iona D’Annunzio ouvre les parapluies et les esprits. La pièce, montrée en novembre au Point Favre, revient les 22 et 23 janvier à l’Étincelle – Maison de Quartier de la Jonction.
Le spectacle des Petits Parapluies célèbre cette minute d’admiration, lorsque, accoudé·e sur le rebord de la fenêtre, vous regardez la danse des gouttes d’eau, glissant harmonieusement sur les brins d’herbe – il pleut dru mais la légèreté de l’eau l’emporte sur la catastrophe des plans à revoir pour la journée. Des parapluies essaimés sur le plateau, comme des touches de couleur sur une palette nue, s’animent dans les mains de la danseuse au gré de la bande-son, réalisée par Nicolas Senjaric. Une musique agitée, évocatrice, étonnante et quelquefois douloureuse. La musique, comme les parapluies, ne suit pas les mouvements de la danseuse, elles existent toutes deux dans des mondes différents et se rencontrent soudainement. Ceci donne l’impression de ne pas suivre une chorégraphie calibrée mais bien de découvrir différents pans d’une histoire, page après page. La danseuse est forte de propositions, passant de l’univers du ballet classique à celui de l’imitation d’animaux.
Iona D’Annunzio dit avoir conçu le spectacle pour le public des très petits (dès 2 ans) et on les remercie, puisque c’est grâce à eux et avec eux que nous remontons le fil des tableaux colorés proposés par la danseuse sur scène. On saluera la valse des projecteurs qui, en balayant la scène de couleurs bien différentes, donne à ce court spectacle une profondeur étonnante : ces changements donnent l’impression de vivre simultanément des histoires pourtant bien distinctes, comme lorsque l’on passe de la crème chantilly au chocolat chaud puis au fond plus pâteux mais délicieux déposé dans la tasse. Des détails précieux !
La dimension colorée, dans une pièce qui s’ouvre sur les bruits de la pluie, rappelle nos efforts, lorsqu’il faut, en plein mois de novembre tout gris, tout fripé, redoubler d’imagination pour divertir les jeunes âmes. C’est amusant de voir tous les rôles investis par les parapluies aux manettes d’Iona D’Annunzio. Ici, l’on célèbre la force d’imagination et de poésie qui créent, tour à tour, un aquarium, une forêt enchanteresse, comme si l’on repoussait les frontières du possible. Si, si, une méduse peut être taureau ou cracher, tout à coup, des paillettes ou devenir cabane au cœur vibrant. Il suffit de voir pour y croire, à tel point que, lorsque l’on ressort dans le brouillard, la tête vibrante d’émotions, on a bien envie de se lancer dans un 1,2,3, Soleil.
Laure-Elie Hoegen
Infos pratiques :
Les petits parapluies, par la Cie Woman’s Move, le 2 novembre 2024 au Point Favre, à Chêne-Bourg.
Mise en scène : Iona D’Annunzio
Chorégraphie et interprétation : Iona D’Annunzio
Musique et scénographie : Nicolas Senjaric
Photos : ©Gregory Batardon