La plume : créationLa plume : littératureRécit participatif n°2 : La Geste d'Avant le Temps

La Geste d’Avant le Temps : épisode 38

Votre salon est trop petit pour vos ambitions ?

Vous rêvez de parcourir des étendues sauvages, des citadelles élancées, de terrasser des dragons, de rencontrer des elfes, de mettre la main sur un trésor… ou d’embarquer sur un bateau pirate ? La Geste d’Avant le Temps est un récit participatif qui veut remédier à l’exiguïté de nos domiciles et rêver d’un autre monde.

La Pépinière a réuni des rédacteurs très différents : amateurs, confirmés, jeunes ou plus âgés, sages, originaux, déjantés, bagarreurs… Ensemble, ils vont vous emmener dans une quête épique, entre fantastique et science-fiction – sur les ailes de leurs imaginations !

Entre le feuilleton et le cadavre exquis, La Geste d’Avant le Temps vous accompagnera chaque jour dans un texte évolutif et des aventures palpitantes. Nous espérons ainsi vous changer les idées, en cette période confinée… Que faire à l’issue du projet ? Lecture publique ? Publication ? Performance ? Nous cherchons encore des idées !

Alors, vous nous suivez ? C’est parti ! Retrouvez le début du feuilleton ICI !

* * *

Épisode 38 : sur Rizator-III

« Voilà pour vous et… voilà pour vous ! » dit la brebis en leur tendant leur boisson.

Les deux tasses fumantes exhalaient un parfum de foin qui rappelait à Hypérion les champs fleuris qui entouraient autrefois son village – comme ça lui paraissait lointain… Tout en buvant et en écoutant distraitement la Directrice bêler des futilités, il surprit Je’An qui fixait un point dans la collection de napperons et de vaisselle peinte d’animaux velus. Il chercha du regard… ne vit d’abord rien… puis ses yeux se posèrent sur un flacon – plutôt un bocal… rempli de… on aurait dit des graines. Du blé. Pourquoi y avait-il du blé dans un flacon au milieu de la collection kitsch d’une brebis à cinq pattes en tailleur rose ?! Décidément, ce monde virtuel était sacrément étrange et les machines d’EIEN avaient vraiment une imagination débordante !

Hypérion ne put s’empêcher de pouffer. Ça semblait si… réel !

La Directrice cessa son babillement en le fixant sévèrement :

« Pourquoi riez-vous, jeune homme ? » demanda-t-elle, vexée.

Il sentait le regard de Je’An le transpercer, mais c’était plus fort que lui. Il s’esclaffait, perdait toute prudence :

« Non, c’est rien – c’est votre bureau. Sérieusement, il faut une sacrée imagination pour inventer ça : c’est complètement ridicule ! Pourquoi des napperons et un bocal de blé, franchement ? »

« Je ne vois pas ce que l’imagination vient faire là-dedans », rétorqua la brebis. « Et d’abord, ce n’est pas du blé ! Ces graines sont extrêmement rares : elle m’ont été offertes il y a très très longtemps par une Voyageuse du Temps aux cheveux violets – je vous ai parlé d’elle, elle s’appelait Boru. Il paraît que ces graines peuvent ouvrir… »

Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase : en une seconde, Je’An avait bondit sur elle et lui tranchait la gorge d’un coup de poignard. Hypérion se figea d’horreur, tétanisé devant le sang qui maculait le bureau. On dirait du vrai… La brebis s’effondra sans un bruit, raide, tandis que Je’An saisissait le bocal de graines et criait à Hypérion :

« Suis-moi ! Grouille !!! »

Une course effrénée dans une foule d’êtres aussi étranges que bigarrés leur permit d’éviter le service de sécurité des douanes. Enfin, ils bondirent sur le quai, à bout de souffle. Hypérion dévisageait son compagnon, encore horrifié par le crime dont il venait d’être témoin :

« Tu… tu l’as… »

Mais Je’An ne lui laissa pas le temps de continuer, plus agité que jamais. Autour d’eux, l’étrange odeur de charogne et de marécage était de retour…

« HYPÉRION ! Joue ! Maintenant ! Et CONCENTRE-TOI, s’il te plaît ! »

Hypérion se secoua : ce n’était pas le moment de se laisser aller. Virtuel virtuel virtuel… rien de tout ça n’est vrai. Ce qui comptait, c’était Elestra. Il rassembla ses souvenirs – le visage de son amie, sa musique… et gratta les cordes de la harpe. Aussitôt, le miroir d’eau apparut, miroitant de mille feux. Je’An y jeta une poignée de graines et y plongea en tirant Hypérion par la manche.

° ° °

Lorsqu’Hypérion se réveilla, il était couché dans un champ de blé. Du blé étrange. Les épis chantaient sous les ondes du vent… tic-tac-tic-tac-tic-tac…

Hypérion se sentait calme… enfin… étendu… détendu… les yeux au ciel, les bras écartés… c’était comme s’il avait oublié ses problèmes. Plus rien n’existait que le moment présent et le tic-tac-tic-tac apaisant. Il caressait les douces pousses… quand… il toucha une sorte de limace. Non, c’était plus gros qu’une limace… tout aussi gluant – mais beaucoup plus épais, plus musclé… et, toujours, l’odeur de charogne et de marécage dans l’air.

Lentement, il tourna la tête et il le vit.

C’était un… une… un truc… une… chose. Hideuse… répugnante. Qui respirait fortement, apparemment couchée sur ce qu’on pouvait appeler son dos. De longs tentacules, des crocs, des griffes, des ailes et une peau parcheminée d’un blanc livide… c’était un être sorti tout droit d’un cauchemar, un démon d’un autre temps, qui sentait autant la charogne et le marécage que le danger…

Soudain les yeux de la créature s’ouvrir et le regardèrent fixement. Ils étaient rouges.

« BOUGE PAS !!! » cria quelqu’un sur sa droite.

Une pie gigantesque s’élança au-dessus d’Hypérion. Elle tenait ce qui ressemblait à un trident et agitait d’un air menaçant ses… six bras et ses ailes ! D’un geste vif, la pie géante planta son arme dans le monstre… ou du moins, essaya, car elle ne toucha que la terre : l’immonde créature avait disparu en un éclair.

« PAR LA BARBE DU MINUTAIN SACRÉ, JE L’AI RATÉ ! C’était le plus gros Mange-Temps que j’ai jamais vu, nom d’une clepsydre ! »

Puis, avisant Hypérion :

« Salut, moi c’est Angélus ! Et toi ? »

Sylvie Bossi

Photo : ©Pexels

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