La Geste d’Avant le Temps : épisode 70

Votre salon est trop petit pour vos ambitions ?

Vous rêvez de parcourir des étendues sauvages, des citadelles élancées, de terrasser des dragons, de rencontrer des elfes, de mettre la main sur un trésor… ou d’embarquer sur un bateau pirate ? La Geste d’Avant le Temps est un récit participatif qui veut remédier à l’exiguïté de nos domiciles et rêver d’un autre monde.

La Pépinière a réuni des rédacteurs très différents : amateurs, confirmés, jeunes ou plus âgés, sages, originaux, déjantés, bagarreurs… Ensemble, ils vont vous emmener dans une quête épique, entre fantastique et science-fiction – sur les ailes de leurs imaginations !

Entre le feuilleton et le cadavre exquis, La Geste d’Avant le Temps vous accompagnera chaque jour dans un texte évolutif et des aventures palpitantes. Nous espérons ainsi vous changer les idées, en cette période confinée… Que faire à l’issue du projet ? Lecture publique ? Publication ? Performance ? Nous cherchons encore des idées !

Alors, vous nous suivez ? C’est parti ! Retrouvez le début du feuilleton ICI !

* * *

Épisode 70 : téléportés !

Angélus sauta, et alors qu’il pensait qu’il allait se fracasser le crâne sur une masse hideuse et sombre, il se surprit à battre des ailes. C’était de bien petites ailes…

« Tiens, qu’est-ce que c’est que cette couleur ? »

Il n’était pas habitué du tout à voler avec des ailes de bien si petite envergure et manqua quand même de se faire percuter par une griffe acérée avant de contrôler son vol. Ouf ! Mais par où aller, avant que le petit être qu’il était devenu ne se fasse réduire en purée ?

« Angélus ! Fonce à ras du sol ! Suis mes instructions : tu trouveras une légère fissure qui donne accès à un tunnel sombre. Prends-le. »

Ni une, ni deux, Angélus effectua une pointe de vitesse pour esquiver le monstre et s’introduire au travers de la fente à peine visible. C’était un tunnel bien sombre et peu engageant, mais il n’avait pas le choix. Il devait aider ses amis et la voix de Nanji le rassurait. Il fut agréablement surpris par son acuité visuelle, qui avait considérablement augmenté lors de sa métamorphose. Il voyait presque comme en plein jour et déterminait les distances plus aisément. C’était pratique pour éviter les nombreuses stalactites et stalagmites dont ce passage était rempli… Puis il déboucha dans une pièce gigantesque, épurée et aux parois lisses et glissantes. Ça sentait la poussière et le renfermé.

« Angélus, enfin ! » s’exclamèrent avec une joie non dissimulée Hypérion, Elestra, Nanji et Euridy.

« Quel plaisir de vous retrouver ! Et entiers, en plus ! » fit Angélus, dont les dernières longues minutes avaient été si éprouvantes qu’un grand nombre de ses plumes d’un bleu électrique était devenu terne et ses ailes pendantes. Ce qui était synonyme de stress et d’anxiété.

Nanji remarqua cette apparence changeante et vint lui donner un coup d’aile, en signe de reconnaissance et de soutien. Elle lui demanda aussitôt comment se portait Sexte et lui expliqua la présence d’Euridy. Angélus eut juste le temps de répondre que le Zirgouflex avait été activé, quand une voix stridente et venue de nulle part l’empêcha de continuer :

« cccrrrRRRIIiiiicc… Guide de l’utilisateur. Tac. »

« Mince, la table de Téléportation nous attend toujours. Hâtons-nous avant qu’elle ne s’éteigne ! » s’exclama Elestra.

« Le Zirgouflex ? Misère, Eien l’avait prédit… » gémit Euridy. « Il ne nous reste que très peu de temps pour que nous gagnions cette lutte… »

« Angélus, il va falloir nous aider », expliqua Elestra. « Nous avons besoin de toi. Tu vois cette Table ? C’est une Table de Téléportation. Grâce à elle, on pourra trouver celui que Hypérion appelle Je’An et le combattre. C’est le chef des Mange-Temps. Chacun de nous va devoir se poser sur un coin de cet échiquier, de manière à garder l’équilibre. Tu me suis ? »

« Oui ! » dit Angélus, un peu paniqué. Il se remettait à peine de ses émotions.

« Tous en même temps, nous devons absolument nous poser sur la case correspondant à la première lettre de notre prénom. Donc, le [A] pour toi. »

« Dépêchons-nous ! » cria Hypérion, qui se débattait avec la puissance de la Néantine et commençait à montrer des signes d’impatience. « Et n’oubliez pas, surtout : la Table nous a dit de penser à l’endroit ou la chose que nous voulons atteindre. Il faut donc que nous pensions tous à notre ennemi, pour le trouver ! »

Un, deux, trois – et c’est dans un battement d’ailes, à l’unisson, que les cinq volatiles achevèrent leur essor sur la case qui leur était destinée. Chacun concentrait son esprit vers un seul but : retrouver celui qu’on nommait Je’An, où qu’il soit. Tous retinrent leur souffle. Le [H], le [A], le double [E] et le [N] se déployaient autour du centre de l’échiquier, disposés à égale distance les uns des autres, comme les cinq pétales d’une fleur. Une harmonie parfaite !

D’abord, il n’y eut rien. Puis la Table émit un léger ‘bip’. Un bruit assourdissant retentit tout à coup, comme un craquement. Le sol se dérobait, disparaissant dans une crevasse béante. On aurait dit un gigantesque trou noir. C’était comme si tout explosait et était aspiré en même temps, dans un chaos infernal. La Table glissa au fond de la salle et l’échiquier se fracassa sur le dallage.

Ils glissèrent dans un dédale visqueux, d’un noir assourdissant.

« AHHHAHHHHHHHHHHHHHHH ! »

Muriel Kritter (avec des clins d’œil de Magali Bossi)

Photo : ©Free-Photos

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