La Geste d’Avant le Temps : épisode 61

Votre salon est trop petit pour vos ambitions ?

Vous rêvez de parcourir des étendues sauvages, des citadelles élancées, de terrasser des dragons, de rencontrer des elfes, de mettre la main sur un trésor… ou d’embarquer sur un bateau pirate ? La Geste d’Avant le Temps est un récit participatif qui veut remédier à l’exiguïté de nos domiciles et rêver d’un autre monde.

La Pépinière a réuni des rédacteurs très différents : amateurs, confirmés, jeunes ou plus âgés, sages, originaux, déjantés, bagarreurs… Ensemble, ils vont vous emmener dans une quête épique, entre fantastique et science-fiction – sur les ailes de leurs imaginations !

Entre le feuilleton et le cadavre exquis, La Geste d’Avant le Temps vous accompagnera chaque jour dans un texte évolutif et des aventures palpitantes. Nous espérons ainsi vous changer les idées, en cette période confinée… Que faire à l’issue du projet ? Lecture publique ? Publication ? Performance ? Nous cherchons encore des idées !

Alors, vous nous suivez ? C’est parti ! Retrouvez le début du feuilleton ICI !

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Épisode 61 : le livre d’heures

Mes heures il chantera mi sol si la ré do
De ta harpe tu l’accompagneras mi ré la do ré si sol mi do
La porte du temps s’ouvrira mi sol si la ré do mi si
L’horloger, immobile me saisira mi ré la do ré si sol mi do la

La page du livre ne contenait que cette courte incantation, dans une écriture manuscrite toute en rondeur. L’ouvrage reposait, ouvert, sur une antique écritoire de bois toute cironnée par le temps, non loin du fantastique mécanisme horloger de la bibliothèque. Elestra venait de relire ce qui semblait être un sésame, en fredonnant la mélodie qu’indiquaient les notes. Euridy se tenait immobile, à côté d’elle. Depuis cette découverte, les deux femmes n’avaient pas échangé une seule parole.

« Voilà bien qui est extraordinaire ! Ce livre semblait nous attendre, et depuis longtemps ! » déclara enfin Euridy en dépoussiérant la page toute craquelée par une trop longue soif d’être lue. « Il ne nous reste plus qu’à respecter la marche à suivre… Sauf qu’on ne sait ni quelle porte on doit ouvrir ni ce que l’horloger devra saisir ! »

« Oui, mais je crois savoir qui est l’horloger… » nuança Elestra.

Refermant le livre sur sa main, elle en lut le titre, gravé sur la vielle couverture de cuir élimé :

« Livre d’heures… On dirait que ça a un rapport avec cette espèce d’horloge digne d’un horloger fou… »

Ce disant, elle rouvrit le livre à la page du psaume, avant de s’approcher du mécanisme dont toutes les parties et les rouages semblaient chacun dotés d’une vie propre. Seule l’étrange aiguille tranchait avec cette agitation, dans une superbe immobilité. Une porte de verre semblait être l’unique accès à cette curiosité mécanique… mais de toute évidence, nulle poignée, nul bouton, nul crochet n’était susceptible d’en déclencher l’ouverture, comme Elestra le constata suite à une vaine exploration de l’« horloge » sous toutes ses coutures.

« Nous voilà bien avancées », commenta Euridy, plutôt dépitée. « Un horloger immobile, tu connais ça, toi ? »

« Pour ma part, je ne serais pas si pessimiste. Si tu aspires à rester Diacre, je te suggère de te montrer plus positive. Ce n’est pas l’horloger qui est immobile, c’est ça », ajouta Elestra en désignant l’aiguille, hiératique au milieu du chaos.

Euridy s’approcha pour constater que les déductions de sa jeune disciple tenaient la route. Évidemment… c’est l’aiguille qui est immobile… Soudain, elle sentit comme un frôlement sur son épaule. Elle se retourna. Son œil incrédule fut d’abord attiré par une, puis deux minuscules taches luminescentes.

Puis, en découvrant les créatures qui les incarnaient, elle poussa un hurlement qui retentit dans les dédales de la bibliothèque, paralysant Elestra de stupeur…

Olivier May

Photo : ©Pexels

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