La plume : créationLa plume : littératureRécit participatif n°3 : Et la marmite se brisa

Et la Marmite se brisa : épisode 3

Vous aimez les enquêtes et les énigmes ?

Vous rêvez de courir après les meurtriers, d’élucider des crimes, d’être aussi habile que Sherlock Holmes, aussi perspicace qu’Hercule Poirot ? Les interrogatoires ne vous font pas peur et les indices, c’est votre rayon ? Bienvenue dans Et la Marmite se brisa, une fabuleuse enquête de Miss Apfel !

Et la Marmite se brisa est un nouveau récit participatif lancé par La Pépinière à l’automne 2020. Entre le feuilleton et le cadavre exquis littéraire, nous avons réuni des autrices et auteurs de tous bords : amateur.trice.s, confirmé.e.s, déjanté.e.s, sérieux.ses, jeunes ou plus âgé.e.s… Après le succès de nos récits participatifs précédents (Du jardin au balcon et La Geste d’Avant le Temps), les voilà prêt.e.s à s’embarquer pour une nouvelle aventure, sans savoir ce qui les attend. Cap sur le polar helvétique !

Pour cette première aventure de Miss Apfel (qui évoque bien sûr la Miss Marple d’Agatha Christie), plongez dans les secrets historiques de Genève…

Alors, ça vous tente ?

Retrouvez le début du feuilleton ICI !

* * *

Épisode 3 : carillons et scène de crime

39 Grand-Rue, Vieille-Ville de Genève.

Matin du 10 décembre.

Isaac Tabazan a sorti son calepin et donne ses instructions aux deux gendarmes qui lui ont été assigné sur cette affaire. Une affaire, certes, mais pas n’importe laquelle ! Sa première en tant qu’inspecteur de la police criminelle – un titre qui, il peut se l’avouer après tous les sacrifices qu’il a fait pour en arriver là, sonne plutôt bien. Bref, une consécration, à seulement 33 ans.

Il faut boucler au plus vite le périmètre autour de l’Ancien-Arsenal : des passants se sont approchés dangereusement et seraient peut-être même capables de compromettre la scène de crime… une gageure qu’il ne peut laisser passer ! L’appointé Diego Lalimaz se précipite et accroche la fameuse banderole rouge et blanche aux piliers, signalant explicitement le caractère INTERDIT du site. L’adjudant Alphonse Danltaz prépare pour sa part avec minutie l’appareil photo et l’éclairage ad hoc, pour le catalogage des indices.

Il sera ensuite temps d’interroger les trois témoins à l’origine de la découverte du corps : Joël Picot, Charles Brandt et Emmanuelle Veterini : 25, 40 et 34 ans. Deux éboueurs et une éboueuse. Isaac Tabazan se frotte les mains, dans le froid du matin qui s’affirme. Il n’a pas encore bu son premier café, mais ça promet déjà.

                                                                       *

Ni une, ni deux, Miss Apfel saute dans ses baskets de marche, compagnes de toutes ses aventures. Direction ? L’origine de ce cri, pardi ! Une pareille vocalise doit receler des mystères… et aucun mystère ne lui résiste.

Heidi a à peinetout juste le temps de la suivre que Miss Apfel file en direction de l’Hôtel de Ville, d’où semble provenir le bruit. On distingue d’ailleurs un attroupement à la hauteur de la Chancellerie d’État. Voilà qui a de quoi intriguer, de si bon matin…

Heidi rejoint, un peu essoufflée, sa tante qui s’est arrêtée devant l’Ancien-Arsenal. Quand elle est lancée, il est très difficile de soutenir son rythme !

Devant elles, un sacré tableau se dessine – un bazar horrifique qui laisse pantois, les bras ballants et la bouche entrouverte de stupéfaction : un corps affalé sur l’un des canons, avec une marmite en lieu et place de tête ; la police, un inspecteur et ses deux sous-fifres ; trois personnes, peut-être des témoins (et probablement des éboueurs, à en juger par leur tenue)… et plus loin, derrière les protections, des badauds attirés par la curiosité, mais très vite effarés par la scène qui se déroule devant eux.

Soudain, Heidi, les yeux écarquillés devant ce macabre spectacle, sent un drôle de frôlement contre sa jambe. Elle baisse la tête pour découvrir un vieux matou qui cherche à recevoir des caresses.

« Mais oui, mais oui, mon beau chat, tu vas avoir droit à des papouilles. Viens là ! »

Le chat de gouttière se délecte un instant des gratouilles que lui prodigue Heidi, juste derrière les oreilles, mais revient à l’assaut et tente de grimper sur cette dernière. Le futé félin a senti qu’elle avait quelque chose de bien plus intéressant à lui proposer…

Face au regard goguenard de sa tante, Heidi se sent obligée de se justifier :

« Je n’allais pas laisser ce merveilleux cake banane-chocolat seul chez toi. Et puis je te connais, tu es une championne quand il s’agit t’embarquer dans des histoires pas possibles… et rien de mieux qu’un peu de douceur pour permettre au cerveau de carburer à plein régime ! »

Mais Miss Apfel a déjà tourné son attention vers deux des badauds. Il s’agit de deux vieilles dames, affabulées de leur permanente aux reflets bleutés et parées de leur meilleur vison. Celle de gauche promène un bichon maltais. Elle hoche la tête aux propos de sa voisine.

 « Ma chère ! Quel raffut ! Rien ne va plus ! Vraiment ! Je ne me suis jamais habituée aux bruits de ces jeunes gens qui festoient le soir, mais là, c’est le summum ! Des volées de cloches pendant la nuit… et maintenant des cris au petit matin… encore une bande de malotrus qui se croient tout permis et se permettent de troubler la vie du bon peuple de Genève. Tsss, le savoir-vivre se perd, ma chère Geneviève, je vous le dis, c’était mieux avant ! » s’exclame la voisine dans un soupir affecté.

« Madame Nadine, cela me paraît fort peu probable qu’ils s’agissent de jeunes écervelés, comme vous dites. Il aurait fallu pour cela qu’ils volent les clés du clocher, car la Cathédrale est fermé tous les soirs, n’est-ce pas. Si vous voulez mon avis, je pense que c’est le carillonneur qui s’entrainait… J’ai cru comprendre, au détour d’une conversation sur le parvis de Saint-Pierre, qu’il traversait une passe difficile. Sa femme l’a quitté, elle en avait plus qu’assez que passer derrière sa Clémence adorée. Depuis, on le dit insomniaque. Le pauvre, il paraîtrait également qu’il souffre d’une jalousie maladive par rapport au Guet de la cathédrale de Lausanne. L’un dans l’autre, cela l’a peut-être conduit à de telles extrémités… » glisse la propriétaire du canidé.

Ledit canidé pousse un jappement vindicatif. Il commence à regretter sa gamelle encore pleine et n’aime pas les cancans. Lui, le carillonneur, il s’en tamponne les oreilles, foi de bichon !

« Oui-oui, Bichouchou, j’ai compris, on y va, je te sens tout tremblant. Je ne voudrais pas que tu prennes froid » ajoute-t-elle en se hâtant dans la rue, sous le regard pensif de Miss Apfel.

Carmeline Fischer

La suite, c’est par ICI !

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Photo : © geralt

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