Vous aimez les enquêtes et les énigmes ?
Vous rêvez de courir après les meurtriers, d’élucider des crimes, d’être aussi habile que Sherlock Holmes, aussi perspicace qu’Hercule Poirot ? Les interrogatoires ne vous font pas peur et les indices, c’est votre rayon ? Bienvenue dans Et la Marmite se brisa, une fabuleuse enquête de Miss Apfel !
Et la Marmite se brisa est un nouveau récit participatif lancé par La Pépinière à l’automne 2020. Entre le feuilleton et le cadavre exquis littéraire, nous avons réuni des autrices et auteurs de tous bords : amateur.trice.s, confirmé.e.s, déjanté.e.s, sérieux.ses, jeunes ou plus âgé.e.s… Après le succès de nos récits participatifs précédents (Du jardin au balcon et La Geste d’Avant le Temps), les voilà prêt.e.s à s’embarquer pour une nouvelle aventure, sans savoir ce qui les attend. Cap sur le polar helvétique !
Pour cette première aventure de Miss Apfel (qui évoque bien sûr la Miss Marple d’Agatha Christie), plongez dans les secrets historiques de Genève…
Alors, ça vous tente ?
Retrouvez le début du feuilleton ICI !
* * *
Épisode 6 : Dans le Mandement
Quelque part dans le Mandement.
Début de l’après-midi du 10 décembre.
La vieille coccinelle avance lentement sur la route du Mandement. Ça fait dix bonnes minutes que Miss Apfel et Heidi se traînent dans un cortège de voitures aux plaques 74, derrière un tracteur poussif tirant un char rempli de caisses de vins – on entend jusque-là le tintement des bouteilles !
Miss Apfel sent la moutarde lui monter au nez – qu’elle a fort joli, lui a-t-on un jour dit. Là, trop, c’est trop ! Elle avise soudain un petit chemin qui monte à droite, entre deux murs de pierre. Elle le prend sur les chapeaux de roues, la vieille coccinelle faisant un inquiétant boucan de casseroles en toussant un gros nuage gris foncé, puis elle contourne le vieux cimetière de Satigny, passe Peissy et ses domaines viticoles et se retrouve fonçant à travers vignes et forêts sur la route de l’Allondon. Heidi, la tête à la fenêtre, sourit, les cheveux dans le vent.
Miss Apfel accélère de plus belle, profitant de la vitesse acquise dans la descente. Heidi la regarde, soudain inquiète :
« Heu… tu ne voudrais pas ralentir un peu ? »
Mais la voiture continue sa course folle, dépassant le centre Pronatura dans un éclair. Soudain, elles arrivent à un croisement qu’elles traversent sans ralentir, la vieille coccinelle décollant du bitume et Heidi hurlant de terreur, avant de s’élancer en trombe devant la vieille chapelle de Malval. Elles atteignent la route sans nom qui serpente le long de la rivière et foncent entre deux haies, pour s’arrêter en glissant dans un parking terreux. Quel dérapage ! Heidi respire avec force, les yeux exorbités, en essayant de rassembler ses esprits.
« Bon, tu attends quoi ? » lui lance sa tante, qui a déjà sauté hors de la voiture. « Allez, suis-moi ! »
Miss Apfel fonce aussitôt dans la forêt. Ensemble, elles longent en courant une petite rivière. Des panneaux de bois rongés d’humidité les mettent sur le bon chemin : La Roulave. Elles glissent sur les cailloux humides et dérapent sur des branches tombées, écrasant des champignons qui n’ont rien demandé, faisant fuir des oiseaux qui somnolent dans les frondaisons… Au bout de quelques minutes éreintantes, elles arrivent face à un pont en rondins de bois, jeté à travers le ruisseau. Une pancarte le surmonte, sévère : Passage interdit – Danger.
« Il faut aller par là ! Ce que nous recherchons est dans la falaise ! »
« Heu… tu es sûre que c’est bien prudent ? »
Sans répondre, Miss Apfel enjambe la barrière qui interdit l’accès au pont et monte sur le plus gros rondin. Il oscille un peu sous son poids, mais a l’air de tenir le coup… Prudemment, elle avance pas à pas, en écartant les bras pour garder son équilibre. La traversée lui semble durer une éternité, mais elle finit par arriver de l’autre côté, sur la terre ferme – enfin, si on peut appeler « terre ferme » la boue dans laquelle on s’enfonce d’au moins dix centimètres…
« Allez, à toi maintenant ! Tu fais comme moi et ça va aller », encourage-t-elle Heidi, avec un grand sourire.
La petite s’en tire assez bien, malgré une frayeur au milieu du pont, lorsque son pied glisse du rondin mousseux…
Enfin, elles parviennent en bas de la falaise. À mi-hauteur, un trou sombre… une grotte. Soudain, c’est comme s’il faisait plus froid, plus humide dans l’air hivernal. Après une ascension glissante, en se hissant d’un arbre à l’autre, elles atteignent l’entrée. L’intérieur est terriblement sombre. Prévoyante comme toujours, Miss Apfel sort de son sac à dos une lampe-torche, l’allume, regarde Heidi et sans un mot, entre résolument dans la grotte.
« C’est quoi cette odeur ? On dirait… »
« C’est le bitume. Cette grotte a été creusée pour son extraction, il y a plus de cent ans. »
Elles continuent d’avancer… lorsque soudain, Heidi s’encouble sur quelque chose. Miss Apfel baisse le faisceau de la lampe. C’est… un sac. Un sac en jute, à la panse rebondie. Fermé par une corde. Lentement, elle s’accroupit et entreprend, les doigts tremblants, de défaire le nœud. Elle écarte le tissu et jette un coup d’œil. Ça alors !
À l’intérieur, il y a une marmite en chocolat, remplie de carottes en massepain. Les mêmes carottes que celle retrouvée devant le cavalier sans tête du canon. Et, au milieu de ces carottes… une autre carotte – pas en massepain celle-là, une carotte superbe, brillante, taillée d’une pièce dans une citrine royale orange vif, avec une émeraude en forme de feuille sertie sur le dessus.
Miss Apfel et Heidi ne peuvent détacher leurs regards de cette splendeur lorsque, soudain, un bruit de pas les fait se retourner…
Sylvie Bossi
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Photo : © Glavo