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Geste : On s’est lâché la main

Depuis plusieurs années, le Département de langue et littérature françaises modernes de l’Université de Genève propose à ses étudiantes et étudiants un Atelier d’écriture, à suivre dans le cadre du cursus d’études. Le but ? Explorer des facettes de l’écrit en dehors des sentiers battus du monde académique : entre exercices imposés et créations libres, il s’agit de fourbir sa plume et de trouver sa propre voie, son propre style !

La Pépinière vous propre un florilège de ces textes, qui témoignent d’une vitalité créatrice hors du commun. Qu’on se le dise : les autrices et auteurs ont des choses à raconter… souvent là où on ne les attend pas !

Aujourd’hui, c’est Nolwenn Gorgoni qui prend la plume. Elle vous invite à (re)découvrir un geste à la fois anodin et puissant : se lâcher la main. Bonne lecture !

* * *

On s’est lâché la main

Dans un élan de tendresse
Sa main est venue rencontrer la mienne.
Ses doigts ont enlacé les miens.
Timides mouvements circulaires
De son pouce contre ma paume.

Et ses muscles se sont raidis
Pour serrer plus fort
Écraser mes articulations
Sentir nos pouls
À l’unisson.

Une inspiration.

Un long filet d’air tiède
S’est échappé de ses lèvres
Pour venir effleurer ma joue.
Alors sa main
Sa main s’est détendue.

Fluide insaisissable
Que j’essayais de retenir,
Mais qui s’obstinait
À s’échapper
D’entre mes doigts.

Ma main a supplié la sienne
En se contractant à son tour
Pour serrer plus fort
Écraser ses articulations
Sentir nos pouls.

Mais son pouls battait déjà ailleurs.

Nos doigts ont fait leurs adieux

Sans que nous ayons pu faire les nôtres
Et sachant que nous en étions incapables
Ils ont fini par lâcher prise.

On s’est lâché la main.

Nolwenn Gorgoni

Photo : © Anna Shvets

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