La plume : créationLa plume : littératureRécit participatif n°2 : La Geste d'Avant le Temps

La Geste d’Avant le Temps : épisode 63

Votre salon est trop petit pour vos ambitions ?

Vous rêvez de parcourir des étendues sauvages, des citadelles élancées, de terrasser des dragons, de rencontrer des elfes, de mettre la main sur un trésor… ou d’embarquer sur un bateau pirate ? La Geste d’Avant le Temps est un récit participatif qui veut remédier à l’exiguïté de nos domiciles et rêver d’un autre monde.

La Pépinière a réuni des rédacteurs très différents : amateurs, confirmés, jeunes ou plus âgés, sages, originaux, déjantés, bagarreurs… Ensemble, ils vont vous emmener dans une quête épique, entre fantastique et science-fiction – sur les ailes de leurs imaginations !

Entre le feuilleton et le cadavre exquis, La Geste d’Avant le Temps vous accompagnera chaque jour dans un texte évolutif et des aventures palpitantes. Nous espérons ainsi vous changer les idées, en cette période confinée… Que faire à l’issue du projet ? Lecture publique ? Publication ? Performance ? Nous cherchons encore des idées !

Alors, vous nous suivez ? C’est parti ! Retrouvez le début du feuilleton ICI !

* * *

Épisode 63 : l’épée et l’horloger

La créature leur barrait la route.

Hypérion avait de la peine à distinguer ses formes, mais cela ressemblait à une musaraigne dotée de crocs en forme de sabre. Une musaraigne qui semblait gigantesque ! Les deux araignées arrêtèrent leur course. Hypérion essayait de ne pas trembler, mais avec huit pattes et son peu d’entraînement, cela semblait difficile. Il attendit  que Nanji lui dise quoi faire…

… et fonça sur la bête.

Les deux araignées firent d’abord mine de se jeter dans la gueule du prédateur en fonçant côte à côte. « Maintenant ! » lui dit Nanji. Elles se séparèrent brusquement, désorientant la musaraigne, dont les sabres claquèrent dans le vide.

« Vite ! Il faut trouver un interstice où il ne pourra pas nous suivre », lui lança sa guide.

S’étant ressaisie et retournée, la bête regagnait du terrain dans l’étroit boyau.

« Terminer en araignée bouffée par une musaraigne aux dents de sabre sur cette maudite planète à l’autre bout de l’Univers… Non !!!! » dit Hypérion en accélérant derrière Nanji.

« Non !!! » répéta la Mange-Temps, qui avait capté son cri de rage télépathique. « Suis-moi ! »

Elle s’enfila dans une faille, imitée par Hypérion, qui était talonné – si tant était qu’une araignée fut dotée de talons – par le souffle de l’animal qui s’y coinça le museau, dans un couinement d’impuissance.

°°°

Elestra éclata de rire !

« Mais c’est juste une… enfin deux araignées luminescentes ! »

« Désolée, je déteste les araignées », répondit Euridy, un brin gênée de sa réaction.

« Sauf qu’on n’est pas des araignées ! » entendit prononcer Elestra par la voix de Nanji.

En à peine plus de temps qu’il n’en fallait pour prononcer ces mots, les arachnides firent exploser leur luminescence avant de reconfigurer leur aspect.

Elestra, à peine remise de sa surprise, se jeta dans les bras d’Hypérion. Il l’attira contre lui de  ses VRAIS membres supérieurs engourdis, étonné de retrouver les sensations de son corps au contact de celui de son amie.

« J’ai eu peur pour toi… » lui annonça-t-elle, « enfin pour vous trois… et Angélus ? Et son oncle ? »

 « Endormis. Ils ne craignent rien. » Il désigna le sol et poursuivit : « Ils sont enfermés là-dessous, surveillés par des Gardiens endormis par le venin de Nanji ».

« Et toi, tout va bien » ? lui demanda-t-elle en lui caressant la joue.

« Je vais parfaitement bien, à part qu’on a failli se faire bouloter en grimpant dans ce maudit boyau… »

« Oui, par une mushoraire à dents de sabre. Ce genre d’animal patrouille à travers les murs de la Tour pour éliminer les Manges-Temps susceptibles de se micro-transformer. Son rôle est d’avertir les Gardiens de toute intrusion. Nous avons eu de la chance de nous en tirer… » ajouta Nanji.

Elle avait parlé à haute voix, enfin perçue et comprise par tous les présents, à leur grand étonnement. Son apparence était désormais celle d’un minuscule colibri bleu électrique, au bec plus acéré qu’une pointe de flèche. Cette forme lui plaisait particulièrement : le colibri-foudre était un oiseau endémique de la Nébuleuse des Tornades… Hypérion tendit la main vers elle, fasciné :

« Nanji… c’est à ça que tu ressembles ? »

« Plus de temps à perdre ! » les recadra-t-elle. Puis, s’adressant à la Diacre : « Quand vous avez surpris Elestra, je vous ai suivie sous forme d’araignée jusqu’ici. Lorsque vous avez découvert le psaume du Livre d’heures, je suis tout de suite descendue dans les geôles pour ramener Hypérion. Elestra prépare ta harpe, et toi, Hypérion, voici le Livre des heures ouvert à la bonne page. »

« Euh… je fais quoi ? »

« Tu chantes le psaume, je vais t’accompagner : mi, sol, si la ré, do… et le reste, comme indiqué, d’accord ? Tu vas y arriver ! » lui assura Elestra.

Le garçon hocha la tête. Il n’était pas très sûr de lui (c’était Elestra, la musicienne, après tout !) et il n’était pas rassuré. La jeune fille fredonna la mélodie et il la reprit dans sa barbe. Quand ils furent prêts, Elestra empoigna la harpe. Sur un signe, ils commencèrent. Accompagné par les sons virtuoses de la harpe, la voix d’Hypérion s’envola par les escaliers de la bibliothèque :

Mes heures il chantera
De ta harpe tu l’accompagneras
La porte du temps s’ouvrira
L’horloger, immobile me saisira

À l’instant où le chant s’éteignit dans une longue note finale, la porte de verre de la gigantesque « horloge » s’ouvrit dans un grincement. Au centre du mécanisme qui béait, l’aiguille rayonnait d’une lueur dorée. Sans un mot, Elestra prit la main d’Hypérion, la dirigeant sur la flèche immobile. Le garçon la saisit prudemment et tenta de la tirer à lui.

Sans succès. Il regarda son amie, un peu dépité.

« C’est toi l’horloger, non ? » lui dit-elle doucement, sans montrer aucune impatience, contrairement à leurs deux compagnes qui trépignaient. « Alors si le psaume dit vrai, tu sais quoi faire. »

Revigoré par ce regard confiant, le jeune homme se concentra sur le mécanisme, passant en revue rouages, vis et micro-boulons. Il chercha dans ses souvenirs et soudain, il sut. D’une main, il bloqua la plus grande des aiguilles tictaquant sur le cadran principal, qui semblait la résultante de toutes les forces en jeu.

Tout le mécanisme stoppa net.

De l’autre main, il déboîta habilement l’aiguille immobile et l’extirpa de « l’horloge », dont tous les éléments se remirent immédiatement en mouvement.

Il leva triomphalement l’aiguille, qui se révélait d’or massif, devant les yeux admiratifs de ses compagnes. Soudain, comme une baguette de sourcier affolée par l’eau enfouie d’un puits, la flèche se mit à vibrer, le tirant vers l’escalier qui descendait.

Devant son affolement, que rejoignaient Elestra et Euridy, Nanji lui saisit le bras, rassurante.

« N’aies crainte, la Néantine nous indique juste qu’IL est arrivé… »

Olivier May

Photo : ©HisLoveNeverFails

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