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Pastiche : Lueurs stériles

Depuis plusieurs années, le Département de langue et littérature françaises modernes de l’Université de Genève propose à ses étudiantes et étudiants un Atelier d’écriture, à suivre dans le cadre du cursus d’études. Le but ? Explorer des facettes de l’écrit en dehors des sentiers battus du monde académique : entre exercices imposés et créations libres, il s’agit de fourbir sa plume et de trouver sa propre voie, son propre style !

La Pépinière vous propose un florilège de ces textes, qui témoignent d’une vitalité créatrice hors du commun. Qu’on se le dise : les autrices et auteurs ont des choses à raconter… souvent là où on ne les attend pas !

Aujourd’hui, c’est Ibrahim qui prend la plume et nous invite dans un pastiche… à vous de découvrir l’auteur ou l’autrice d’origine ! Bonne lecture !

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Lueurs stériles

Dans cette chambre aseptisée – une boîte de blanc uniforme, ponctuée par endroits de touches pastel des dessins d’enfants accrochés au mur de ce décor stérile (bien que l’astre solaire se levât déjà, dessinant de timides rayons à travers les rideaux tirés, révélant l’essence laborieuse des premières heures du jour, pénétrant le cocon paisible de mon inconscience, dévoilant un espace encore inconnu) – aux contours familiers mais à l’ambiance teintée d’étrangeté, dans ce lit à l’enveloppe inconnue où le sommeil m’avait suspendu, véritable vaisseau médical (tombeau ? radeau ? lit ? long fleuve continu dont le cours nous amène à notre destin, qui, quoi qu’on y fasse, reprend éternellement l’image du souvenir qu’on lui a associé ? santé de fer ou santé d’or ?), ce lit aux draps d’une blancheur éblouissante (rappelant l’éclat d’une lumière radieuse déjà rencontrée auparavant) ; percevant les bruits (de machines distantes, des oiseaux du matin, murmures sourds et réguliers, présence constante de chaleur ou de vie) qui, sans m’agacer ni réchauffer l’ambiance, chuchotaient à mes oreilles un langage énigmatique ; éprouvant une sensation de faiblesse, d’engourdissement résiduel (comparable à celle de l’animal qui hiberne et qui, après un long moment sans avoir bougé, semble devoir s’étirer doucement à la redécouverte de la fonction de ses membres ou au rituel du sommeil qui emporte notre corps vers un repos sensoriel presque infini) ; pensant – malgré ces câbles qui m’enlacent et me gênent – sans le vouloir (comme si c’était plus fort que moi, ce besoin de réfléchir dans une situation où mon corps ne demande qu’à être laissé tranquille, besoin irrationnel mais qui – peut-être – était un signe de vie, un signe d’un besoin vital qui surpasse tous les autres, un éclair de lucidité – ou de folie – qui domine l’esprit au point de ne même plus s’en rendre compte) ; me remémorant soudain l’intervention nocturne (au cours de cette nuit qui n’avait rien d’une nuit habituelle, sans repos, éternelle, porteuse d’un sombre présage, seul compagnon d’un voyage aux portes de la souffrance), et percevant les vagues lumières qui surgissent encore de l’esprit obscurci, souvenirs épars et brouillés, je me réveillai brutalement dans une chambre d’hôpital.

Ibrahim Abloua

Vous souhaitez découvrir d’autres textes produits dans cet Atelier ? N’hésitez pas à vous rendre dans nos pages numériques… et à découvrir une sélection-florilège sur L’Exultoire (le site de l’Atelier).

Photo : © AlexanderGrey

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