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Pastiche : « malheur… ! »

Depuis plusieurs années, le Département de langue et littérature françaises modernes de l’Université de Genève propose à ses étudiantes et étudiants un Atelier d’écriture, à suivre dans le cadre du cursus d’études. Le but ? Explorer des facettes de l’écrit en dehors des sentiers battus du monde académique : entre exercices imposés et créations libres, il s’agit de fourbir sa plume et de trouver sa propre voie, son propre style !

La Pépinière vous propre un florilège de ces textes, qui témoignent d’une vitalité créatrice hors du commun. Qu’on se le dise : les autrices et auteurs ont des choses à raconter… souvent là où on ne les attend pas !

Aujourd’hui, Matthias Cyrkiel vous propose un pastiche. Sa mission ? S’inspirer de l’incipit de Biffures, La règle du jeu I, de Michel Leiris. Rendez-vous… sur les planches d’une scène. Bonne lecture !

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« malheur… ! »

Sur la scène implacable du théâtre (opéra ? conservatoire ? rideau cramoisi simple ou rideau retenu sur le côté des cordelettes dorées, semblable à celui que je voyais dans la salle de concert du château du prince, dont le but était d’impressionner le public et de l’emmener dans des mondes étrangers en compagnie de toutes les grandes représentations de pièces du théâtre du monde entier ? sol sans voile ni parure, bois poli en forme de chevron, si vieux et si fragile qu’on n’y poussait jamais de meubles, mais qu’on devait toujours les porter pour éviter les égratignures ?), sur la scène immense – éclairée intensément – du théâtre (ancien ou moderne, accueillant ou repoussant, propice aux voyages imaginaires dans des endroits féeriques ou à la représentation de la réalité brutale), dans le grand hall de l’opéra ou la salle du conservatoire, durant l’ouverture de la pièce de théâtre ou la scène finale (suivant qu’il s’agissait ou non d’un de ces jours où l’agitation et la nervosité sont si grandes que tout professionnalisme routinier est perdu et que toutes les attentes des auditeurs projetées sur scène par la lumière rayonnante conduisent à un blocage insurmontable), dans cette salle de spectacle sous les yeux de la haute société – entouré de belles coulisses et d’une décoration amoureuse du détail – ou dans ce bar local qui poussait ensemble trois de ses vieillies tables du bois de chêne pour construire une scène provisoire autour de laquelle les buveurs ou d’autres spectateurs bourgeois s’assemblaient pour voir ce qui s’y passait, l’acteur avait oublié son texte.

Matthias Cyrkiel

Ce texte est tiré de la volée 2021-2022, animée par Magali Bossi et Natacha Allet.
Retrouvez tous les textes issus de cet atelier ICI.

Photo : © 38396

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