La plume : BA7La plume : créationLa plume : littérature

Pastiche : « …NOPINEMENT »

Depuis plusieurs années, le Département de langue et littérature françaises modernes de l’Université de Genève propose à ses étudiantes et étudiants un Atelier d’écriture, à suivre dans le cadre du cursus d’études. Le but ? Explorer des facettes de l’écrit en dehors des sentiers battus du monde académique : entre exercices imposés et créations libres, il s’agit de fourbir sa plume et de trouver sa propre voie, son propre style !

La Pépinière vous propose un florilège de ces textes, qui témoignent d’une vitalité créatrice hors du commun. Qu’on se le dise : les autrices et auteurs ont des choses à raconter… souvent là où on ne les attend pas !

Aujourd’hui, c’est Amaryllis Bosson qui prend la plume. Elle nous invite dans un pastiche… à vous de découvrir l’auteur ou l’autrice d’origine ! Bonne lecture !

* * *

« …NOPINEMENT »

Entre les phrases interminables de l’ouvrage (roman ? conte ? papier grumeleux aux trames antiques ou bien papier lisse et fin aux reflets lumineux sur lequel mes doigts nouveaux suivaient la courbure des mots, sorte d’étendue plane dans laquelle mon imaginaire vierge, prêt à tout admettre, à tout entreprendre, laissait se pavaner fées chuchoteuses, animaux loquaces de toutes sortes, sirènes aux chants angéliques et monstres biscornus aux démarches éloquentes ? papier translucide dont les fibres s’entremêlent en laissant courtoisement passer la lumière, légère par essence et criblée d’une encre opaque qui l’empêchait de s’envoler, poix noire emplissant les contours des lettres sans débords, en me narguant presque, moi qui n’avais encore qu’une écriture hésitante alors ?) entre les lignes infinies – et implacables – de l’ouvrage (massif ou malingre, relié à la colle modeste ou au fil d’or, faisant valser l’imagination ou tomber les paupières), dans un roman ou dans un conte, au début d’un chapitre ou sur la quatrième de couverture (suivant qu’il s’agissait ou non de ces livres rares et précieux, dont la couverture est emplie d’ornements complexes et dorés, de fioritures longilignes et sinueuses, de ces livres rangés en haut de bibliothèque, placés avec fierté de face sur un support et non pas de profil, honteusement glissés dans la masse), dans cet espace brodé de lettres si difficile d’accès – et monde poussiéreux si rarement consulté que l’alphabet y dort volontiers – ou dans ces écrits plus accessibles qui se trouvaient çà et là, sur la petite table des cabinets, sur la commode de la chambre, sur l’étagère du salon, selon les dernières mains entres lesquelles il avait voyagé, la poule aux coudes pointus était apparue[1].

Amaryllis Bosson

Vous souhaitez découvrir d’autres textes produits dans cet Atelier ? N’hésitez pas à vous rendre dans nos pages numériques… et à découvrir une sélection-florilège sur L’Exultoire (le site de l’Atelier).

Photo : © munzelminka

[1] La poule aux coudes pointus (image dessinée ? figure imaginée ? personnage de bande dessinée caricatural aux traits cubiques et à la langue bien pendue, comme en témoigne peut-être la taille des phylactères qui surplombent ce gallinacé fantastique, ou bien, créature mystique extrait d’un bestiaire moyenâgeux, provenant d’un grenier faisant office de cabinet de curiosité vidé suite au décès de son propriétaire centenaire, ou encore, logotype bucolique d’une maison d’édition, crée par un graphiste au goût prononcé pour le bétail des basses-cours, ayant peut être observé avec enthousiasme les détails des bestiaux composant ces joyeuses ménageries, ou peut-être, l’image sauvée, unique symbole parlant d’un poème retravaillé, biffé de long en large, jusqu’à qu’il ne reste plus que cette figure emblématique, curieusement marquante dans le regard de la jeune enfant que j’étais et qui me reste encore aujourd’hui) apparaît dans le roman pour enfants de Shaïne Cassim, Une saison avec Jane-Esther.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *